Estomacs sensibles, s’abstenir. L’histoire du jour nous vient d’un urgentiste américain, via l’émission de podcast médical « It won’t hurt a bit » (le titre est ironique). Un homme de 30 ans s’est présenté aux urgences de Fresno, en Californie, avec des crampes d’estomac et des diarrhées sanglantes, pour réclamer un traitement vermifuge. Devant le médecin, peu ému, il a déballé un solide argument : un long ver blanc enroulé autour d’un rouleau de papier toilette...
La suite de l’histoire est racontée par l’urgentiste en question, le Dr Kenny Bahn de l’hôpital de Fresno. Perclus de douleurs intestinales, l’homme avait profité d’un séjour aux toilettes pour s’adonner à quelques explorations. Face à ce qui ressemblait à « un morceau d’intestin » émergeant de son postérieur, il a déroulé la piste pour y voir plus clair. Avant de s’apercevoir que le boyau frétillait encore.
1,70 mètre de bonheur
En fin de compte, c’est un spécimen de ver parasite plat que le jeune homme hébergeait dans ses entrailles. Une fois déroulé, il mesurait la bagatelle de 1,70 mètre de long, soit la hauteur d’un adulte. Il va sans dire que le patient est reparti avec un traitement vermifuge, au cas où d’autres spécimens auraient jugé opportun d'élire domicile dans ses entrailles.
Mais d’où venait le ver ? Selon toute probabilité, il s’agit d’un Diphyllobothrium, ou ténia du poisson. Grand amateur de cuisine japonaise, le patient consommait presque tous les jours des sushis et autres sashimis. Or le saumon cru du Pacifique, s’il n’est pas traité convenablement, est susceptible d’héberger des larves de Diphyllobothrium. Une fois dans son hôte définitif, ce ver parasite peut grandir jusqu'à mesurer dix mètres de long.
Pas une raison d’arrêter les sushis
Heureusement, le Diphyllobothrium ne se trouve pas dans le saumon européen, rappelle l’Agence de sécurité sanitaire (Anses) dans sa fiche d’information dédiée. Comme la plupart des restaurants japonais s’approvisionnent en saumon de Norvège, il est possible de continuer à manger des sushis en France sans trop d’arrière-pensées. C’est d'autant plus vrai que les normes sanitaires sont très strictes. Il est en revanche conseillé de faire attention si l’on consomme du saumon pêché soi-même, notamment autour du lac Léman.
D’autres parasites présents dans le poisson cru sont à redouter. C’est notamment le cas de l’anisakis, une larve de ver qui ne résiste pas plus de trois jours dans l’estomac mais peut donner lieu à des allergies et des indigestions parfois sévères. La plupart des cas d'anisakiase ont lieu au Japon ou en Australie, mais il y a peu, un Portugais avait eu l'honneur d'une publication dans le BMJ Case Reports. En France, on estime le nombre de cas à une douzaine par an. Dans les cas les plus graves, il faut souvent extirper les larves par endoscopie.
Une semaine au congélateur
De façon générale, toute consommation de viande crue – bœuf, porc, poisson – comporte un risque, faible mais réel, de contracter des parasites alimentaires. Mieux vaut donc congeler le poisson frais avant consommation, afin d’éliminer les larves de parasites. L’Institut Pasteur de Lille conseille un séjour d’une semaine au congélateur, à -20 °C. Dans les restaurants servant du poisson cru, ce traitement d’inactivation est obligatoire.
En prenant ces précautions, la consommation de poisson cru est sans danger. Reste l'aspect psychologique, dont chacun se débrouille comme il peut... Et pour les photos, rendez-vous ICI et LÀ. Bon appétit.