« Nos résultats sont importants parce qu'une association entre la grippe et l'infarctus aigu du myocarde renforce l'importance de la vaccination chez les personnes à risque cardiovasculaire », explique Dr. Jeff Kwong, auteur principal d’une récente étude sur le sujet.
Les maladies coronaires restent la première cause de décès dans le monde. Le fait qu'une infection grippale puisse déclencher un infarctus du myocarde et un décès est suspecté depuis les années 1930, quand une association entre grippe saisonnière et mortalité cardiovasculaire a été pour la première fois observée. Mais, jusqu'ici, les études souffraient de nombreux biais, en particulier sur le diagnostic de grippe, et ne permettaient pas d'établir un lien de cause à effet.
Une étude de référence
Dans l’étude publiée aujourd'hui dans le New England Journal of Medicine, qui a porté sur près de 20 000 diagnostic virologiques, les chercheurs ont trouvé une association significative entre les infections respiratoires aiguës liées à un virus de la grippe et l'infarctus aigu du myocarde. Les résultats finaux ont concerné une série de 364 hospitalisations pour infarctus du myocarde survenant après un diagnostic biologique avéré de grippe.
Le risque est maximal pendant les 7 premiers jours après le diagnostic virologique, où il est multiplié par 6, et disparait ensuite. Quand on analyse des intervalles de temps plus étroit, le risque est multiplié par 6,3 du premier au 3ème jour et il est multiplié par 5,78 du 4ème au 7ème jour.
Le risque pourrait être plus élevé (différence non-significative) chez les personnes âgées de plus de 65 ans, les malades atteints d'une infection par le virus grippal B, plutôt que le A, et ceux dont c'est le premier infarctus. Du fait du faible nombre de malades infectés par le virus H1N1, les chercheurs n'ont pas pu établir de différence de risque selon le type de virus grippal.
La vaccination n'apparait pas comme ayant un influence sur le risque d'infarctus dans cette étude, mais l'étude n'était pas organisée pour évaluer cela et elle ne remet pas en cause les recommandations de vaccination dans cette population à haut risque.
Les chercheurs ont également trouvé un risque élevé – moins élevé que pour la grippe - avec les infections à d'autres virus respiratoires.
Une augmentation de l'inflammation
La cause du lien entre grippe n'a pas été étudiée dans cette étude, mais dans d'autres publiées auparavant. Dans un contexte d'athérosclérose généralisée, c'est-à-dire le lésions étendues de la paroi interne des artères (plaques d'athérosclérose), l'infection grippale conduit à un état inflammatoire qui renforce la capacité des plaquettes circulant dans le sang à se coaguler pour former un caillot sur une plaque qui normalement ne donnerait rien.
De plus, l'infection augmente la fièvre et la consommation en oxygène du cœur, et donc les besoins en sang oxygéné, d'où une accélération du rythme cardiaque (tachycardie) qui risque de décompenser brutalement une situation précaire. L'inflammation perturbe également le fonctionnement des artères et de leur paroi interne, l'endothélium.
Prendre des précautions
Ces résultats, basés sur un diagnostic virologique et des grippes avérées, sont en ligne avec les résultats des études antérieures. Les risques sont un peu plus élevés, ce qui peut être dû au fait que les autres études ne faisaient pas la différence entre grippe et d'autres infections virales respiratoires (où le risque est plus faible). « Nos résultats, mis en parallèle avec des études antérieures montrant que la vaccination antigrippale réduit les événements cardiovasculaires et la mortalité, et elles soutiennent les recommandations internationales qui préconisent la vaccination contre la grippe chez les personnes à haut risque de crise cardiaque », explique Dr. Kwong.
Les personnes à risque cardiovasculaire devraient prendre également des précautions pour prévenir les infections respiratoires, et en particulier la grippe, à travers des mesures barrières telles que la vaccination, associée au lavage des mains régulier des mains.
Les chercheurs ajoutent que les malades ne devraient pas temporiser en cas de symptômes cardiaques en particulier, dans la première semaine d'une infection respiratoire aiguë. Une consultation médicale est alors impérative et urgente.