Quatrième cause de mortalité en France, le cancer du pancréas tue 300 000 personnes par an. Chez la plupart des patients atteints d'un cancer du pancréas, le diagnostic est posé lorsque la maladie est déjà avancée et il n'existe actuellement aucun traitement efficace. Cependant, un groupe de chercheurs du Centre national de recherche sur le cancer (CNIO) - dont les travaux ont été publiés dans les Actes de la revue de l'Académie nationale des sciences (PNAS)- a peut-être trouvé un nouvel angle d'attaque.
Une des caractéristiques du cancer du pancréas est que les cellules tumorales sont noyées dans le stroma, tissu nourricier qui représente 90% de la masse tumorale et qui constitue un rempart chimique et physique interférant avec les traitements par inhibiteurs, chimiothérapie ou immunothérapie. Comme le soulignent les auteurs de cette nouvelle étude, la plupart des études antérieures sur le cancer du pancréas ont principalement porté sur les cellules tumorales, mais très peu de travaux se sont intéressés à celle qui forment le stroma.
Reprogrammation cellulaire sélective
Récemment, plusieurs études se sont intéressées aux fibroblastes dits associés au cancer (CAF), qui représentent les cellules les plus abondantes du stroma. Les résultats ont cependant montré que la tumeur a continué à progresser avec encore plus d'agressivité. Ces résultats suggéraient donc que certaines des cellules éliminées pouvaient avoir des fonctions anti-tumorigènes.
Les chercheurs du CNIO ont axé leur travail sur les CAF, afin de découvrir pourquoi et comment ces cellules favorisent la croissance de la tumeur, dans l'espoir d'inverser le processus. Une stratégie innovante puisqu'au lieu d'éliminer ces cellules stromales qui favorisent la croissance de la tumeur, l'objectif de cette étude était d'aboutir à une reprogrammation sélective de ces cellules. L'analyse a révélé que la présence d'un gène nommé Saa3 encourageait les CAF à déclencher la progression de la tumeur. En éliminant le gène Saa3 gène des CAF, les chercheurs ont constaté que ces cellules se comportaient comme des fibroblastes normaux.
"Cette tumeur est si agressive et si complexe qu'il est nécessaire d'essayer de l'attaquer à partir de diverses sources et pas seulement aux cellules tumorales. Notre travail ouvre donc la porte à la conception de futurs traitements à combiner avec d'autres stratégies, telles que l'immunothérapie, la chimiothérapie ou des inhibiteurs contre des voies de signalisation spécifiques des cellules tumorales. Toutefois, il est encore trop tôt pour penser à son utilisation clinique", tempère Magdolna Djurec, auteure principale de l'étude.