"Me masturber était la seule manière de calmer mes crises d’angoisse liées aux problèmes du quotidien, les questions d’argent surtout. Une pulsion irrépressible m’envahissait, je devais le faire. Après, j’étais rassuré, ça allait mieux, mais je me sentais sale."
Insomnie, honte, fureur
Comme trois autres patients de sexe masculin ayant participé à un groupe de parole du service d’addictologie du CHU de Nantes, Laurent* raconte son addiction au sexe dans le journal Le Monde, mettant en lumière la souffrance générée par cette dépendance. Se masturber six fois par jour, passer des heures à collecter du porno sur Internet, devoir impérativement partir en chasse de prostituées, passer des appels compulsifs aux call-girls du téléphone rose… Tous ces symptômes de l’addiction au sexe provoqueraient, entre autres, insomnies, sentiments de honte, tristesse, fureur ou encore pensées suicidaires, justifiant selon ces témoignages une véritable prise en charge médicale et/ou thérapeutique.
"Concrètement, il fallait utiliser un 'virus' pour nous éviter de passer à l’acte quand ça nous reprenait, explique cette fois Yann, qui a suivi une thérapie comportementale et cognitive. Moi, j’allais me promener, ce qui m’éloignait de mon ordinateur et coupait mes angoisses. Mais, au début, ça ne réussissait pas toujours. Alors, pour limiter mes visionnages de porno, j’avais un minuteur à côté de moi. Il sonnait au bout de 30 minutes. Petit à petit, j’ai fini par diminuer la dose."
L'addiction au sexe, un syndrome encore méconnu des médecins
Reconnue par l’Organisation mondiale de la santé (OMS) comme des troubles du contrôle des habitudes et des impulsions, à l’instar des pyromanes et des kleptomanes, mais pas par l’Association américaine de psychiatrie, l’addiction sexuelle est encore une dépendance méconnue des scientifiques, qui peinent à trouver un traitement adapté. Aucun médicament n’arrive actuellement à en venir à bout, que se soit les antidépresseurs ou les antiandrogènes, réservés aux seuls délinquants sexuels. Et si les thérapies comportementales et cognitives obtiennent des résultats, elles ne soignent pas "la vulnérabilité profonde des patients", comme le précise la psychologue Marthylle Lagadec au quotidien, qui, faute de prise en charge, risquent de tout perdre - travail, famille, amis.
Selon l’institut fédératif des addictions comportementales (Ifac), aucune donnée chiffrée n’existent actuellement sur l’addiction sexuelle en France, faute d'enquête épidémiologique. Aux États-unis en revanche, "ce serait entre 3 et 6 % de la population générale qui aurait des comportements sexuels compulsifs. Ils seraient à 80 % de sexe masculin".