Faut-il ou non, prescrire du Baclofène à fortes doses aux personnes alcooliques ? L'Agence du médicament ANSM statuera "au plus tard à la rentrée" de septembre sur cette question, a indiqué son directeur général, Dominique Martin. Un débat public mêlant experts et associations devrait être organisé dans quelques mois.
Si une autorisation de mise sur le marché (AMM) de ce relaxant musculaire était acceptée pour soigner l’alcoolisme, il s’agirait d’une première mondiale "puisqu'à notre connaissance, aucun autre pays du monde n'encadre l'usage du baclofène dans l'alcoolodépendance". Alors qu’il était prescrit depuis 2014 à cet effet dans le cadre d'une recommandation temporaire d'utilisation (RTU), l’Agence nationale de sécurité du médicament (ANSM) avait publié une étude coréalisée par la Caisse nationale d’assurance-maladie (CNAM) et l’Inserm, concluant que le niveau de sécurité du médicament était "préoccupant" lorsqu’il est utilisé à fortes doses chez les personnes alcooliques.
Instruction de la demande d’AMM du #baclofène dans le traitement de l’alcoolo-dépendance en cours #petitdejANSM
— ANSM (@ansm) 13 février 2018
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La colère des patients
Dans la foulée, l’ANSM avait réduit la dose de prescription à 80 mg par jour, contre 300 mg auparavant "compte tenu du risque accru d’hospitalisation et de décès", ce qui avait eu pour effet de susciter la colère de certains patients. Le 24 janvier 2018 l’une d’entre eux a saisi le conseil d’Etat pour réclamer le droit de prescrire le médicament à fortes doses aux personnes alcooliques. Deux recours ont été déposés : l’un en annulation pour contester l’interdiction et l’autre pour demander sa suspension en urgence.
La RTU est maintenue le temps que l'ANSM se prononce sur la demande d'autorisation de mise sur le marché (AMM) du médicament dans le traitement de l'alcoolisme. Déposée en avril 2017 par le laboratoire Ethypharm, cette demande est actuellement en cours d'examen.
Baclofène, un placebo ?
L’étude ALPADIR publiée dans Alcohol and Alcoholism en mai 2017, a démontré que le Baclofène ne provoque pas de différence majeure par rapport à un placebo. 320 adultes alcooliques ont été recrutés dans les services d’addictologie français. Du Baclofène a été prescrit à la moitié d’entre eux, tandis que les autres volontaires ont reçu un placebo. Il a été observé après six mois de traitement que la molécule avait une faible efficacité : 12 % des patients sous médicament n’ont pas consommé d’alcool pendant 20 semaines consécutives, contre 10,5 % dans le groupe placebo. Le Baclofène, réalité ou illusion ?