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Décryptage

Contraception "naturelle" : le Collège des gynécologues dénonce un leurre

Par Dr Philippe Montereau avec Anaïs Col

Devant le succès grandissant des méthodes de contraception dites "naturelles", en particulier chez les jeune femmes, la Fédération nationale des collèges de gynécologie médicale (FNCGM) alerte les jeunes femmes sur l'efficacité très relative de ces méthodes contraceptives, qui ne sont le plus souvent que des "leurres". 

matka_Wariatka/istock

Efficaces ou pas ? Après le scandale de la pilule de 3e génération, les craintes sur la possibilité d'avoir des enfants à l'arrêt de la pilule, de nombreuses femmes ont préféré privilégier des méthodes de contraception dites "naturelles" comme l'abstinence périodique durant le cycle d'ovulation, le retrait de l'homme, l'observation de la courbe de température et de la glaire cervicale. Or ces méthodes ont des taux d'échec de 17 à 20% selon la Fédération Nationale des Collèges de Gynécologie Médicale (FNCGM).

Encouragées par les réseaux sociaux, certaines jeunes femmes à la vie sexuelle "encore épisodique" et ferventes adeptes des préservatifs masculins (qui protègent aussi des IST, il est vrai) considèrent que la prise quotidienne d'une pilule devient plus contraignante et expose à plus de risques qu'elle n'est utile.

Pourtant d'après l'INED, c'est dans cette tranche d'age que l'on observe le plus fort taux d'interruptions volontaire de grossesse itératives (2 chez 10% d'entre elles et 3 chez 4% !). Or l'IVG est loin d'être une contraception.

La contraception naturelle est un "leurre"

La Fédération Nationale des Collèges de Gynécologie Médicale (FNCGM) alerte dans un communiqué, sur la fiabilité plus que relative de ces méthodes, à l'origine selon elle, de nombreux avortements. N'en déplaise aux adeptes des techniques contraceptives naturelles, "il n’est pas toujours simple de repérer la période d’ovulation. La femme n’est pas un robot et ne fonctionne pas toujours comme un métronome". La période d'ovulation peut en effet varier en fonction de la fatigue, du stress ou suite à un choc émotionnel et sa durée changer d'un mois à l'autre. Toutes ces variations sont à l'origines des nombreux déboires de ces méthodes et des IVG qui en résultent.

Natural Cycles, l'application controversée qui se voulait révolutionnaire

L'application suédoise Natural Cycles se présente comme une méthode alternative à la pilule contraceptive, "aussi fiable", et bénéficiant d'un marquage CE. Basée sur la prise de température et le jour du cycle, un algorithme fait le calcul et donne un code vert pour les rapports qui peuvent être non-protégés, et rouge, pour les rapports qui doivent être protégés ou l'abstinence. 

Le site de Natural Cycles revendique une efficacité contraceptive de 93% (soit un indice de Pearl de 7), alors que celle de la pilule est de 91%. De nombreuses femmes ont été naturellement séduites. Cette assertion n'est pourtant basée que sur une étude rétrospective, c'est-à-dire non contrôlée, parue dans la revue The European Journal of Contraception & Reproductive Health Care, qui n'est pas vraiment une référence absolue. La lecture fait apparaître une étude réalisée par les propriétaires de l'application eux-mêmes, absolument pas comparative à la pilule et qui n'aurait jamais dû conduire à un marquage CE.

Un hôpital suédois qui s'est chargé des 37 avortements liés à cette méthode, a émis un signalement auprès de l'agence de santé suédoise responsable de la régulation de ce type de produits, afin de voir si d'autres grossesses non désirées ne seraient pas attribuables à cette méthode très faillible. L'agence des produits médicaux, l'AMP, qui est en Suède l'équivalent de notre Agence nationale de sécurité des médicaments et des produits de santé (ANSM), a ouvert une enquête pour connaître l'ampleur des échecs de l'application. 

Le stérilet, le moyen de contraception le plus utilisé au monde

La Fédération Nationale des Collèges de Gynécologie Médicale (FNCGM) rappelle que la pilule n'est pas le seul moyen contraceptif efficace, même si certaines pilules peuvent être particulièrement intéressantes en cas de règles douloureuses (20%) ou de syndromes prémenstruels marqués (40%), de façon permanente ou pour une certaine période. Les gynécologues sont disponibles pour orienter les jeunes femmes vers d'autres méthodes adaptées à leurs attentes et à leurs contraintes. Il existe des sites institutionnels d'information sur les différentes méthodes et leur avantages et inconvénients.

Chaque femme est différente et ce choix lui appartient. D’autres méthodes contraceptives comme le stérilet, l’anneau vaginal, le patch contraceptif ou encore les préservatifs sont disponibles. Le stérilet est d'ailleurs le moyen de contraception le plus utilisé dans le monde. Facile et rapide à poser, presque indolore, il est également très facile à enlever et la grossesse redevient possible immédiatement. Longtemps réservé aux femmes de la quarantaine en France, le stérilet peut être proposé aux jeunes femmes comme ailleurs dans le monde.