Que faire face à un malade dans le coma ? Faut-il poursuivre ou non les soins ? Quelles sont les probabilités que la personne se réveille ? Des questionnements rencontrés par nombre de médecins et de familles. Des conflits et des drames aussi qui ont récemment fait la une de l'actualité.
Le plus souvent, les tests visant à déterminer les chances de récupération (Glasgow coma scale, EEG...) sont assez peu fiables et la décision de poursuivre ou d'arrêter les soins se base plutôt sur l'expérience des médecins que sur un véritable rationnel scientifique. D'où des souffrances liées à l'incertitude pour les familles, voire des conflits avec les médecins.
Une méthode d’IRM quantitative
Une nouvelle technique d'imagerie médicale, l'IRM type "Brain Diffusion Tensor Imaging", qui mesure les flux des molécules d'eau dans les cellules nerveuses, associée à la définition de seuils de désorganisation des flux d'information dans le cerveau, permettrait de déterminer si la personne va se réveiller ou non.
Elle a été publiée dans Lancet Neurology et réalisée par une équipe de chercheurs belges, italiens et français. Avec cette technique, les médecins pourraient enfin de passer de la culture de "l'opinion" à celle de la "preuve scientifique". Un élément indispensable pour renforcer la confiance avec les familles.
La recherche s’est concentrée sur les comas qui surviennent après un arrêt cardiaque, des comas assez homogènes en terme de cause et de physiopathologie (coma par hypoxie). 200 patients ont participé à l’étude dans des centres en Belgique, en France et en Italie. Des adultes, dans le coma depuis plus de sept jours.
Une méthode d'analyse du fonctionnement de la substance blanche
Grâce à la technique d’IRM "Brain Diffusion Tensor Imaging", les scientifiques sont parvenus à mesurer le mouvement de l’eau dans la substance blanche du cerveau. La substance blanche, c’est cette matière qui permet la connexion entre les neurones, et entre les neurones et reste du corps : c'est donc cette substance blanche qui véhicule l'information dans le cerveau et c'est en quelque sorte la possibilité de circulation de cette information dans le cerveau que les chercheurs ont mesuré avec la visualisation du déplacement des molécules d'eau dans les neurones en IRM quantitative.
Une technique fiable
L'IRM "Brain Diffusion Tensor Imaging" permet d'analyser la structure de la substance blanche et voir si les connexions sont encore fonctionnelles. Lorsque la substance blanche fonctionne normalement, l'IRM voit des mouvements harmonieux des molécules d'eau le long des neurones et ces molécules vont toutes dans le même sens. Lorsque le cerveau ne marche pas, les mouvements des molécules d'eau sont dysharmonieux
A partir de ces mesures les chercheurs ont mis au point un index basé sur l’analyse du mouvement des molécules d’eau dans la substance blanche du cerveau mesuré par IRM en tenseur de diffusion entre le 7e jour et le 28e jour après la survenue de l’arrêt cardiaque (WWM-FA pour "quantitative whole-brain white matter fractional anisotropy").
Cet index mesure le niveau de désorganisation de ce mouvement des molécules d'eau pour établir des seuils. Ce sont ces derniers qui permettraient de prédire avec une très haute précision le devenir clinique à 6 mois de ces patients dans le coma.
Des index de récupération
Pour les chercheurs, cette technique des seuils basés sur le WWM-FA est fiable et surtout pourrait permettre de faciliter la prise de décision à l’avenir, avec des arguments analysant réellement le fonctionnement du cerveau.
Louis Puybasset est professeur et chef du service d'anesthésie-réanimation, à l’hôpital Pitié Salpêtrière à Paris, il a dirigé cette étude: « Au-dessus d’un certain seuil, on est certain que ça ira ; au-dessous, on est certain que ça n’ira pas. Dans la zone grise, il faut attendre. »
Une technique supérieure à tous les autres test
Cette technique est une mesure anatomo-physiologique qui ne fluctue pas selon le même chercheur. Ce qui permet d’avoir des preuves de qualité et en quantité suffisante pour décider ou non de l’arrêt des soins. « Cette technique est supérieure à tous les autres tests utilisés à ce jour », affirme Louis Puybasset.
Des tests de plus grande ampleur doivent toutefois être menés pour confirmer ces résultats, en particulier dans les coma d'autres causes, mais cette technique va permettre d'être plus précis pour les familles en souffrance.