Partie de la région de Bordeaux, initialement sur un campus universitaire, l’épidémie n’a cessé de s’étendre depuis novembre 2017 et on en est à 913 cas dans 59 départements métropolitains. Surtout, et ce qui inquiète le plus la Direction Générale de la Santé, un tiers des cas observés sont survenus pendant le dernier mois et 90% en 2018. On peut donc parler d’accélération nette.
L’activation du niveau 2 du Centre Opérationnel de Réception et de Régularisation des Urgences Sanitaires et Sociales (CORUSS « renforcé ») permet de améliorer le suivi quotidien de l’épidémie, de publier des données hebdomadaires et adapter la réponse. Il permet de mobiliser les Agences Régionales de Santé. Parallèlement, la DGS s’assure que le stock de vaccins est suffisant.
????Augmentation du nombre de cas de #rougeole en France depuis novembre 2017 en raison d'une couverture vaccinale insuffisante chez les nourrissons, les enfants et les jeunes adultes
— SantépubliqueFrance (@santeprevention) March 14, 2018
??Plus il y a de personnes vaccinées, plus on évite le risque d’épidémiehttps://t.co/fsFECyz671 pic.twitter.com/o3h9eN23ne
L’épidémie « galope » désormais
Selon le Directeur Général de la Santé, Jérôme Salomon, cette tendance actuelle « nous fait craindre une épidémie d’ampleur importante comme celle que nous avons observée en France, entre 2008 et 2012 ».
On n’en est pas encore là, puisque près de 24 000 cas avaient été observés à cette époque. Mais depuis novembre, 201 malades ont été hospitalisés, dont 9 en réanimation et une jeune femme de 32 ans est décédée des complications pulmonaires d’une rougeole à Poitiers, rougeole qu’elle aurait contractée aux urgences.
Surtout, il apparaît en Février que, sur les cas de rougeole 2017, deux tiers n’étaient pas du tout vaccinés et seuls 8% avaient déclaré avoir reçu les 2 doses nécessaires au vaccin. Les cas chez l'adulte sont plus graves et conduisent à une hospitalisation une fois sur 2.
[? Conférence] Epidémie de #Rougeole : point de situation https://t.co/8oNIDaWoza
— MinSolidaritésSanté (@MinSoliSante) March 14, 2018
Importance de la vaccination
Le Directeur Général de la Santé rappelle qu’il n’y a pas de traitement antiviral spécifique de la vaccination et que la seule protection contre cette maladie très contagieuse (un malade pourrait contaminer jusqu’à 15 personnes) est la vaccination (ROR).
Celle-ci est particulièrement bien tolérée (et ne contient pas d’aluminium) et l’élimination de tout risque de contamination est obtenu lorsque 95% de la population est vaccinée. Avec 62 à 88% de personnes vaccinées selon les départements, la France en est encore loin, à la différence des pays du nord de l’Europe qui ont appliqué les directives santé de l’Union Européenne, dont un des objectifs est l’éradication de cette maladie potentiellement grave.
Vaccination de rattrapage
Lors d’une de ses interventions en février, la Ministre de la santé, Agnès Buzyn avait insisté sur la nécessité de faire un rattrapage vaccinal chez les personnes non-vaccinées, en plus de la vaccination obligatoire des enfants depuis le 1er janvier. En effet, avec la contestation et le relâchement de la politique vaccinale de ces dernières années, il y a toute une frange de la population jeune qui n’est pas vaccinée (entre 15 et 20%), alors que les contre-indications réelles sont extrêmement rares.
Le Ministère de la santé a publié des recommandation pour la lutte contre l'épidémie. Les Agences régionales de santé ont reçus des instructions pour mener des actions de rattrapage vaccinal auprès des populations à risque et auprès des professionnels de santé.
[#Rougeole] Fin du point de situation.
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Retrouvez les recommandations pour éviter l’extension de l’épidémie :
???? Lire le communiqué de presse : https://t.co/4Wg0efBErq
???? Revoir la conférence : https://t.co/jglpbyMvfD pic.twitter.com/3tzhEWTrS2
Un relâchement généralisé vis-à-vis de la vaccination
Plusieurs explications sont avancées à cette situation française : effondrement de la médecine scolaire avec suivi des enfants moins rigoureux, banalisation du risque et indifférence des parents, sentiment général anti-vaccins relayé par les réseaux sociaux... Selon l'adage du « il n'y a pas de fumée sans feu », beaucoup de parents qui lisent ici ou là des diatribes anti-vaccins se disent qu'il y a peut-être quelque chose.
Résultat, toute une frange de la population n'a pas été vaccinée et elle a entre 20 et 40 ans, un âge où la rougeole est grave quand elle est contractée, ce qui explique le taux très inhabituel d'hospitalisations. La vaccination obligatoire des enfants mise en place au 1er janvier 2018 ne suffira pas et un rattrapage est bien nécessaire.
Les microbes frappent les groupes
La rougeole est une maladie infectieuse d’origine virale, très contagieuse, qui donne une éruption cutanée évocatrice seulement dans une deuxième phase de la maladie. Elle se transmet principalement par la respiration, par exemple lorsqu’un malade contagieux tousse, il envoie dans l’air des microgouttelettes de salive infectées par le virus. Il est possible également de contracter la rougeole après contact avec une surface contaminée par des sécrétions nasales et les expectorations.
Pour se disséminer, le virus aime donc la promiscuité, les groupes, les réunions. Quoi de plus favorable qu’un campus d’étudiants ? Et c’est de celui du campus universitaire de Bordeaux qu’est partie l’épidémie actuelle.
Contagieux 4 à 5 jours avant l'éruption
La « période d’incubation » du virus de la rougeole est de 10 à 12 jours pendant laquelle aucun signe n’apparaît. C’est une période muette pendant laquelle le virus se multiplie.
La phase de contagiosité du malade démarre la veille de l’apparition des premiers signes non-spécifiques de la maladie (bien avant l'éruption sur la peau) et s’étend jusqu’à 5 jours après le début de l’apparition des boutons sur la peau. Ainsi, une personne contaminée, selon les spécialistes, en contamine 15 à 20 autres.
Les signes cliniques initialement peu spécifiques
Les premiers signes se déclenchent lors de la « phase d’invasion ». Elle dure 3 à 4 jours avec une fatigue, de la fièvre à 38°5-40°, une toux sèche, les yeux rouges et le nez qui coule. Les enfants peuvent souvent en plus se plaindre d’un mal de ventre. Dans la bouche, on retrouve des petits points blancs sur la muqueuse des joues, c’est « le signe de Köplik ».
L’éruption cutanée caractéristique arrive de façon brutale au 15ème jour après la contagion, c’est « l’exanthème morbiliforme ». Elle commence derrière les oreilles et descend rapidement sur le visage et le tronc puis sur le corps tout entier. Les boutons sont des taches roses bombées irrégulières, « les maculo-papules », séparées par des intervalles de peau saine. Elles ne démangent pas et disparaissent en 5 à 6 jours.
Seule protection : la vaccination
Il n'y a pas de traitement antiviral spécifique du virus de la rougeole. Les antibiotiques ne servent qu'en cas de surinfection des poumons avec une bactérie. Le seul moyen d’éviter de contracter la rougeole est donc de se faire vacciner. Très efficace, la vaccination est seulement contre-indiquée chez l’allergique au blanc d’œuf, chez l’immunodéprimé, et pendant la grossesse.
Traditionnellement, le schéma vaccinal consiste en l’injection d’une dose de vaccin ROR (Rougeole, Oreillons, Rubéole) à 12 mois puis une deuxième injection entre 16 et 18 mois. Pour les personnes n’ayant jamais été vaccinées contre la rougeole, un rattrapage est possible. Il consiste en l’injection de deux doses de vaccin à au moins un mois d’intervalle.
En cas d’épidémie, il est possible de recevoir le vaccin jusqu’à 72 heures après avoir été en contact avec une personne souffrant de la rougeole pour éviter la survenue de la maladie (vaccination de rattrapage).