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Iatrogénie

Anévrisme et dissection aortique augmentés par un antibiotique

Par Camille Boivigny

Les fluoroquinolones, un antibiotique courant, augmenteraient de 66% le risque de développer un anévrisme ou une dissection aortique, selon une nouvelle étude nationale suédoise. Ces antibiotiques sont très souvent prescrits face à des sinusites bactériennes ou des infections des voies urinaires.

beerkoff/istock

Un risque plus que doublé de développer un anévrisme ou une dissection de l’aorte lors d’un traitement par fluoroquinolone, c’est ce que révèle une nouvelle étude de cohorte nationale suédoise publiée dans le BMJ.

Pourcentage inquiétant étant donné que ces antibiotiques représentent par exemple 30 millions de prescriptions ambulatoires par an aux Etats-Unis.

360 088 dossiers épluchés 

Des chercheurs de l’Institut Karolinska de Stockholm, de l’université de Lund et du Statens Serum Instite de Copenhague ont épluché les registres nationaux suédois de santé (médicaments, patients, causes de décès) entre juillet 2006 et décembre 2013 afin de comparer le risque de pathologie aortique chez 360 088 personnes sous fluoroquinolones (dont 78% de ciprofloxacine) versus amoxicilline, dans les 60 jours suivant le début du traitement.

Un risque plus que doublé

Leurs travaux font état d’un risque 66% plus élevé de développer un anévrisme (dilatation) ou une dissection (rupture) de l’aorte. Durant les 60 jours suivant l’instauration du traitement, il y a eu 64 cas d’anévrisme ou de dissection aortique parmi les 360 088 personnes traitées par fluoroquinolones, contre 40 cas sur 360 088 individus traités par amoxicilline.

Une classe médicamenteuse très prescrite

Aux Etats-Unis, ils représentent 30 millions de prescriptions ambulatoires par an. En 2016, leurs effets secondaires potentiellement dangereux ont même conduit la FDA à « approuver les changements d’étiquetage de sécurité pour renforcer les avertissements concernant leur association avec des effets secondaires invalidants et potentiellement permanents et pour limiter leur utilisation.»

Une évaluation européenne

C’est un mécanisme d’activité non-antimicrobien qui est à l’origine de ces effets indésirables graves : les fluoroquinolones induiraient une activité accrue d’enzymes particulières : les métalloprotéinases matricielles.
Cela conduit à une dégradation du collagène, ce qui compromet l’intégrité de la matrice extracellulaire de la paroi vasculaire.

Ces résultats incitent à une évaluation européenne de l’innocuité des fluoroquinolones. Les chercheurs précisent avoir besoin d’études supplémentaires pour déterminer s’il existe des différences entre les diverses fluoroquinolones et si en pratique clinique leur prescription doit être modifiée.