Les services des urgences des hôpitaux sont au bord de l’implosion. C’est l’amer constat et le cri d’alarme émis par plusieurs centres hospitaliers partout en France.
D’après les chiffres fournis par le ministère de la Santé vendredi 16 mars, 97 hôpitaux sur 650 ont dû activer le plan « hôpital en tension » afin d’obtenir l’ajout de lits supplémentaires dans les différents services.
10 000 patients en attente d’un lit
Une situation intenable selon le personnel, alors que la saturation des services des urgences, inhabituelle à cette époque de l’année, ne semble pas prête à se résorber. Le syndicat Samu-Urgences de France signalait le 9 mars dans un communiqué qu’en l’espace de deux mois et demi, plus de 15 000 patients avaient passé la nuit sur un brancard faute de lit pour les hospitaliser dans un service. Depuis le mois de janvier, 100 000 patients ont passé la nuit sur un brancard.
Même constat observé dans les services d’urgences pour adultes des établissements de l’Assistance publique-Hôpitaux de Paris (AP-HP), qui accusent un taux d’occupation en journée de 15% à 25% supplémentaire par rapport au taux moyen en 2016, soit « pratiquement le niveau observé au pic des épidémies hivernales », rapporte Le Monde.
Des conséquences parfois dramatiques pour les patients
Résultat de cette saturation : des patients installés sur des brancards dans les couloirs et qui patientent parfois pendant des heures avant d’être examinés. « Nous n’avons plus de salle d’examen disponible et nous examinons donc les patients dans les couloirs », raconte au Monde un médecin urgentiste d’un hôpital parisien.
Parfois, « les conséquences pour les patients sont dramatiques », déplore François Braun. Président du syndicat Samu-Urgences de France et chef des urgences de l’hôpital de Mercy à Metz, il explique que « cette surcharge entraîne une augmentation de la mortalité de 9% pour tous les patients et de 30% pour les patients les plus graves ».
Cela s’est vérifié à plusieurs reprises ces dernières semaines. Le 6 mars dernier, une femme de 73 ans est décédée aux urgences du CHU de Reims après avoir patienté deux heures et demi sur un brancard et sans avoir été examinée. À Lyon, c’est une étudiante de 19 ans qui est morte d’un abcès du cerveau, secondaire à une otite compliquée. Elle s’était rendue aux urgences de l’hôpital Édouard-Herriot à deux reprises et avait été renvoyée chez elle avec un traitement antibiotique.
Pas qu'une question de moyens
Pour de nombreux responsables des urgences, la situation n’est plus tenable. « Ça craque de partout, l’hôpital est en train de s’écrouler », s’alarme Christophe Prudhomme, porte-parole de l’association des médecins urgentistes de France et membre de la CGT cité par Le Monde. Un constat partagé par François Braun. « Cette situation est le signe que le modèle hospitalier est au bout du bout et qu’il doit se réorganiser », juge sur FranceInfo le président de Samu-Urgences de France.
Pour Thierry Amouroux, secrétaire général du Syndicat national des professionnels infirmiers (SNPI), la saturation actuelle des services des urgences n’est pas tant un problème d’organisation qu’une question de moyens. « Si on est dans cette situation, c’est parce qu’on a fermé 100 000 lits en dix ans », a-t-il affirmé lundi 19 mars sur les ondes de FranceInfo. Pour ce dernier, si rien n’est fait, la situation sera encore plus difficile l’an prochain. En dix ans, le ministère de la Santé a réalisé 7 milliards d'économies dans le budget de l'hôpital public.
Une situation qui n'exonère pas la médecine libérale car beaucoup de malades vont aux urgences faute de trouver un médecin disponible.