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Alerter les bébés

Les Etats-Unis veulent "ficher" tous les bébés...

Par Camille Sabourin

Il ne s'agit pas seulement de les inscrire à l'état civil, mais bien d'aller fouiller au cœur de leur ADN... Les Etats-Unis envisagent en effet de décoder l’ADN de tous les bébés. En clair, tout savoir de leur avenir médical. Mais enjeux médicaux ne doivent pas faire oublier les problèmes éthiques.

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25 millions de dollars pour répondre à une question. C’est la somme que les instituts américains de santé ont mis sur la table. Juste pour faire un test.

Séquencer le génome 

L’histoire commence à la fin des années 90. Une annonce en fanfare du président Bill Clinton, donnant à la recherche médicale américaine des crédits illimités pour déterminer la séquence exacte de chacune des trois milliards de lettres du code génétique qui forment un génome humain. Des milliards – aussi – de dollars plus tard – pour découvrir, en 2003, le séquençage complet du génome d’un premier homme.

Des milliards de dollars en 2003 pour une seule personne, et 15 ans plus tard, on parle de tous les bébés américains. L’annonce, il y a trois ans, de la commercialisation d’un test de séquençage du génome coûtant moins de 300 euros, est passée presque inaperçue, alors qu’il y avait dans cette nouveauté tous les ingrédients d’une véritable bombe médicale. C’est le miracle des progrès informatiques : la capacité de doubler les performances tous les trois mois depuis cette époque.

Avec le séquençage, on peut prévoir beaucoup de choses inscrites dans nos gènes… La tendance à l’obésité, au diabète ou à l’infarctus, ou la réaction de chacun face à l’alcool.

Et puis surtout, il faut savoir si le dépistage précoce de certaines anomalies génétiques qui prédisposent à certaines maladies peut changer le destin des enfants. 

Lire comme dans un livre dans le patrimoine génétique d’un enfant permet de prédire son avenir, mais pas dans les moindres détails. Notre santé ne dépend pas que de nos gènes. Par exemple, le déclenchement d’une maladie infectieuse ne pourra pas être détecté. Mais si un enfant a une prédisposition génétique au diabète, il peut s’avérer utile de mettre en place une bonne hygiène alimentaire dès le plus jeune âge.

Début 2014, les nouveau-nés et leurs familles qui feront partie de ce programme de recherche ont été recrutés. En à peine 50 heures, le génome de ces bébés a été séquencé, pour quelques centaines de dollars.

Confidentialité et l’éthique

Comment savoir si ces bébés, devenus des adultes, seront d’accord avec cette expérience ? C’est vrai que le séquençage du génome suscite beaucoup d’interrogations. En particulier, dépister une maladie à la naissance ne signifie pas qu’on l’on est capable de la soigner, et encore moins de la guérir. Dans ces conditions, faut-il annoncer aux parents que leur enfant développera cette maladie ? Et comment les médecins peuvent-ils faire le tri dans les informations recueillies ? Toutes ces questions devraient trouver leurs réponses d’ici 2 ans.

En France, le séquençage à grande échelle de tous les nouveau-nés n’est pas pour tout de suite. Cependant, pour un de nos meilleurs experts dans le domaine, le Dr Laurent Alexandre, nous prenons le même chemin que les Etats-Unis. Il pense que 100% des bébés seront séquencés au début des années 2020. Et même avant la naissance. On vous laisse deviner les dérives possibles.

Les adultes peuvent faire cet examen en Belgique et cela coûte moins de… trois cents euros. En 24 heures, sans douleur, à partir d’un simple prélèvement cellulaire avec un coton tige. Des dizaines de milliers de candidats vont pouvoir bénéficier de ce qui paraissait de la science-fiction. Des voix s’élèvent contre cette possibilité et l’utilisation détournée de cette « mine » de renseignements intimes et personnalisés et l’utilisation que pourraient en faire les assureurs ou les employeurs…