Jusqu’à ce jour, aucune étude scientifique ne suggère de lien entre les vaccins que reçoivent les enfants dans les premières années de leur vie et l’augmentation du risque autistique. La seule étude à avoir évoqué cette association était une fraude et elle a été retirée du Lancet. Cela n’empêche pas certains parents de renoncer à faire vacciner leurs enfants, d’autant plus si l’un de leurs frères et sœurs est lui-même autiste.
C’est ce que met en lumière une étude de l’institut américain Kaiser Permanente publiée le 26 mars dans la revue JAMA Pediatrics. Dirigés par le Pr Ousseny Zerbo, les chercheurs ont découvert que les enfants autistes sont moins susceptibles d’être vaccinés que les autres enfants du même âge. Ce faible taux de vaccination concerne aussi leurs frères et sœurs cadets.
« Dans cette vaste étude exhaustive, nous avons constaté qu'après le diagnostic d'autisme chez les enfants, les taux de vaccination étaient significativement inférieurs à ceux des enfants du même âge et qui n’avaient pas été diagnostiqués autistes », explique le Pr Zerbo. Selon lui, cela pourrait exposer les enfants aux maladies contre lesquels les vaccins protègent.
Un taux de vaccination inférieur de 12%
L’étude menée par les chercheurs s’est intéressée à plus de 3 700 enfants atteints de troubles du spectre autistique (TSA) diagnostiqués à l’âge de 5 ans et à près de 500 000 enfants sans TSA nés entre le 1er janvier 1995 et le 30 septembre 2010, ainsi que leurs frères et sœurs respectifs, nés entre le 1er janvier 1997 et le 30 septembre 2014. Le Pr Zerbo et ses. Ils ont cherché à savoir s’ils avaient bien reçu les vaccins recommandés le Comité consultatif sur les pratiques d'immunisation des Centers for Disease Control and Prevention (CDC).
Ils se sont alors constaté que les enfants diagnostiqués autistes étaient 12% moins susceptibles d'être complètement vaccinés après le diagnostic que les enfants ne présentant pas de TSA. Par exemple, chez les enfants âgés de 7 ans et plus, 94% des sujets sans TSA ont reçu tous les vaccins recommandés entre l'âge de 4 et 6 ans. Chez les enfants autistes ils ne sont que 82% à avoir été vaccinés. Pour le vaccin contre la rougeole, les oreillons et la rubéole (ROR), seuls 84% des enfants présentant un TSA ont été vaccinés, contre 96% des autres enfants.
Cela vaut aussi pour les jeunes frères et sœurs d’enfants autistes : eux aussi sont moins vaccinés que la moyenne. Par exemple, pour les vaccins recommandés entre 1 et 11 mois, seuls 73% des frères et sœurs plus jeunes d’enfants atteints de TSA ont été complètement vaccinés, contre 85% des autres enfants.
« Je ne m'attendais pas à voir une telle différence », explique le Pr Zerbo au Time Magazine. « Ces taux de vaccination plus faibles chez les enfants atteints d'autisme et chez leurs frères et sœurs suggèrent qu'ils pourraient avoir un risque plus élevé de contracter maladies évitables par la vaccination. »
Une étude frauduleuse à l’origine de la défiance anti-vaccins
Comment expliquer ces faibles taux de vaccination chez les enfants autistes et leurs cadets ? Il semblerait qu’une étude datant de 1998 et maintes fois discréditée soit à l’origine de la croyance selon laquelle les vaccins pourraient développer des troubles du spectre autistique chez les enfants.
France Info raconte ainsi qu’il y a vingt ans, le chirurgien Andrew Wakefield a publié un article dans la revue médicale The Lancet dans lequel il reliait l’autisme à la vaccination ROR. En 2010, une enquête a révélé qu’Andrew Wakefield avait déformé les résultats et omis de divulguer les intérêts financiers qu’il avait perçus, violant les codes de conduite éthique. Il a depuis été radié à vie de l’Ordre britannique des médecins.
Mieux informer les familles sur la vaccination
Depuis, l’idée que les vaccins pourraient contribuer à l'autisme continue d'avoir un impact sur les taux de vaccination, comme le suggère l’étude du Pr Zerbo. Le CDC a ainsi rapporté en 2017 que 70% des cas de rougeole enregistrés par l'agence de 2001 à 2015 sont survenus chez des personnes qui n'avaient pas été vaccinées contre la maladie.
Pour le Pr Zerbo, il est nécessaire d’améliorer la communication et la pédagogie entre les médecins et les familles afin de faire prendre conscience à ces dernières de la nécessité de faire vacciner les enfants. Il souhaite également poursuivre l’étude pour approfondir les raisons pour lesquelles les parents d'enfants autistes ont décidé de réduire la vaccination de leurs enfants. « Nous espérons mieux comprendre ce qui motive ces différences. »