La prescription d’antibiotiques ou de médicaments anti-reflux dans les six premiers mois de la vie induit chez les nourrissons un risque accru de développer de l’asthme, des allergies alimentaires ou encore des rhinites allergiques. Ce résultat, fruit du travail de chercheurs américains, a été publié le 2 avril dernier dans Jama Paediatrics.
Sur une cohorte de 792 000 nourrissons, les chercheurs ont montré que les médicaments anti-reflux (antihistaminiques et inhibiteurs de la pompe à protons) étaient à l’origine d’un risque accru de développer de l’asthme, des allergies alimentaires et des rhinites allergiques dans les années qui suivent. Il en allait de même pour les antibiotiques, liés à davantage d’asthme, de conjonctivites et de rhinites allergiques.
Un microbiote mis à rude épreuve
Mais quel est le lien entre ces médicaments et le risque de développer des maladies de type allergique ? "Les antibiotiques et les médicaments anti-reflux sont susceptibles de perturber le microbiote intestinal", explique le Dr Edward Mitre, de l’université Uniformed Services (USU, Maryland), premier auteur de l’étude. Or, les chercheurs ont montré ces dernières années que la flore intestinale joue un rôle clé dans l’apparition de maladies auto-immunes.
Les premières années de vie sont cruciales pour l’établissement de la flore digestive. Le nouveau-né, propulsé de l’environnement à un milieu riche en bactéries, met entre 2 et 4 ans à se constituer une flore complexe et stable, proche de celle d’un adulte. Les antibiotiques sont susceptibles de perturber cette dynamique en réduisant la diversité du microbiote. Des études récentes suggèrent que les médicaments anti-reflux produisent le même effet, du fait sans doute de leurs propriétés anti-acide.
À employer avec prudence
Le reflux gastrique se caractérise par des remontées de l’estomac vers l’œsophage. Très fréquent chez l’enfant, il donne lieu à des régurgitations de lait ou à des vomissements parfois spectaculaires. Généralement bénin, il peut donner lieu à une prise en charge médicamenteuse lorsqu’il est trop fréquent ou accompagné de signes préoccupants : pleurs, irritabilité, cassure de la courbe de poids...
Quant aux antibiotiques, ils sont principalement utilisés chez le nourrisson en cas d’infection ORL sévère, comme une otite récidivante ou une angine à streptocoque.
"L’étude suggère que les antibiotique et les médicaments anti-reflux ne devraient être utilisées que dans les situations où le bénéfice clinique est clair", conclut Edward Mitre. En langage non médical, c’est un appel clair à la prudence. On soupçonne que la prescription d’antibiotiques dans les premiers âges de la vie pourrait aussi favoriser la survenue d’obésité ou de diabète, des maladies chroniques caractérisées par une forte dimension auto-immune.