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Mifepristone

Cancer du cerveau : un vieux médicament offre une nouvelle alternative dans le schwannome

Par Camille Boivigny

La mifepristone, un médicament qui sert à provoquer des avortements aux Etats-Unis, pourrait constituer une alternative thérapeutique pour la prise en charge de certaines tumeurs cérébrales, les schwannomes vestibulaires, et pour lesquelles peu d’options de traitement existent.

JFalcetti/istock

Des chercheurs montrent dans une nouvelle étude que la mifepristone, un médicament utilisé depuis longtemps pour provoquer des avortements précoces aux Etats-Unis et en Europe, serait un traitement potentiel de certaines tumeurs cérébrales fréquentes et difficiles à traiter : les schwannomes vestibulaires.

Leurs résultats sont publiés dans Scientific Reports le 3 avril 2018.

Le schwannome vestibulaire

Les schwannomes sont des tumeurs qui surviennent généralement dans un contexte de neurofibromatose de type 2, une maladie génétique, et plus rarement de façon sporadique. Histologiquement, ces tumeurs ne sont pas malignes, mais elles s’avèrent dangereuses lorsqu'elles grossissent en raison de leur localisation à la base du crâne sous le cerveau.

Issues des cellules de la gaine de Schwann du nerf vestibulaire, le nerf de l'équilibre, ces tumeurs peuvent se développer au point d’endommager le nerf vestibulaire et provoquer des vertiges, mais aussi les structures voisines avec un risque de une paralysie du nerf facial, de perte auditive voire même de décès si leur développement comprime le tronc cérébral.

Actuellement, c’est la 4ème tumeur intracrânienne la plus fréquente. Les seuls traitements possibles se limitent à la résection chirurgicale et la radiothérapie. Or ces deux procédures exposent les malades à des risques importants du fait de la difficulté d'accès à la tumeur, comme une paralysie faciale ou la perte de l’audition.

Une solution issue du screening informatique 

Dans l’objectif de trouver une alternative à ces traitements invasifs, les chercheurs ont réalisé un screening informatique de plusieurs bases de données de médicaments. Cela consiste à établir, à l’aide d’un algorithme, un score de correspondance entre des médicaments connus et les gènes exprimés dans une pathologie pour laquelle on n'a pas de moyen médicamenteux.

Ils ont ainsi identifié 8 médicaments potentiellement capables de ralentir ou arrêter la croissance des schwannomes vestibulaires, dont la mifepristone. Selon les chercheurs, la mifepristone pourrait permettre de réduire voire d’éviter le recours à la chirurgie et à la radiothérapie.

Qu'est-ce que la mifépristone ?

La mifepristone est un antagoniste des récepteurs de la progestérone et des glucocorticoïdes utilisé comme médicament pour provoquer les avortements avant le 63e jour d'aménorrhée.

Cette molécule est connue pour son effet antiprolifératif sur les cellules cancéreuses cervicales, mammaires, endométriales, ovariennes et prostatiques. Par ailleurs, c’est une molécule qui traverse la barrière entre le sang et le cerveau (barrière hémato-encéphalique). C’est pourquoi les chercheurs ont estimé que ce traitement constituait le meilleur candidat médicament.

En effet, ils ont constaté dans leur étude que cette molécule réduisait la prolifération des cellules tumorales de 80%. Une réponse dose-dépendante a été observée, parallèlement à une diminution « spectaculaire » de la prolifération cellulaire. De plus, la mifepristone réduit la viabilité des cellules cancéreuses sans affecter les cellules saines, et n’induit que très peu d’effets indésirables (légère fatigue, bouffées de chaleur, nausées, éruptions cutanées).

Les chercheurs concluent que la mifepristone possède un potentiel thérapeutique important et espèrent pouvoir bientôt commencer un essai clinique de phase II.