Des "pseudo-médecines", des "promesses fantaisistes" à "l’efficacité illusoire". Le 18 mars dernier, ces expressions sont apparues dans les colonnes du Figaro. Le quotidien publiait en effet une tribune à charge contre les médecines alternatives signée par 124 professionnels de santé. En cause, selon eux, l’inefficacité des "médecines douces" que sont l’homéopathie, la mésothérapie et l'acupuncture.
"Face à des pratiques de plus en plus nombreuses et ésotériques, et à la défiance grandissante du public vis-à-vis de la médecine scientifique, nous nous devions de réagir avec force et vigueur", écrivaient alors les signataires, qui réclamaient des mesures pour ne plus reconnaître ces pratiques, ne plus les enseigner et obliger les professionnels de santé à s’en écarter.
Parmi les pratiques ciblées dans la tribune, l’homéopathie est sans doute la plus critiquée. Les signataires la jugent "coûteuse pour les services publics" et basée "sur des croyances promettant une guérison miraculeuse et sans risques".
Une tribune "très injurieuse" et "diffamatoire"
Plus de trois semaines après sa publication, la tribune n’en finit pas de faire parler d’elle. Parmi les signataires de la tribune, quatre médecins généralistes ont reçu des appels de convocation de la part de leur conseil départemental de l’Ordre des médecins. Une plainte a également été déposée à l’encontre de dix d’entre eux par des organisations syndicales de médecins homéopathes, mésothérapeutes et acupuncteurs.
D’après Le Figaro, s’il est pour le moment impossible de savoir si les plaintes aboutiront, elles peuvent toutefois se traduire par des mesures disciplinaires plus ou moins lourdes pour les signataires. Les avocats qui les ont rédigées reprochent notamment aux médecins d’avoir tenu des propos "offensants, diffamatoires et même insultants" et "contraires aux principes déontologiques de confraternité, de considération de la profession".
"Cette tribune était très injurieuse contre tous les médecins pratiquant ce genre de médecines alternatives. Elle traite ces médecins de charlatans", regrette le Dr Meyer Sabbah. Pratiquant la mésothérapie, l'homéopathie, l'acupuncture et la phytothérapie, ce médecin généraliste dans les Alpes-Maritimes est l'origine de la plainte, en son nom propre et en tant que président de deux organisations syndicales.
Les signataires persistent et signent
De leur côté, les signataires visés par la plainte affirment s’être préparés à faire l’objet de poursuites. Sur son compte Twitter, le Dr Vincent Ropars, médecin généraliste remplaçant dans le Finistère, affirme ne pas avoir peur d’une éventuelle condamnation ou de mesures disciplinaires. "Je suis même fier de ce qui m’arrive. Car, si des contradicteurs amènent le débat sur le terrain de la plainte ordinale, c’est parce que probablement aucun argument valable ne leur paraît possible sur le terrain du débat public", écrit-il.
Pas question d’ailleurs pour lui de rédiger des excuses publiques, pourtant réclamées par le Dr Meyer Sabbah, principal plaignant. "Malgré cette plainte, je ne regrette pas du tout d’avoir signé la tribune. S’il fallait le refaire, je n’hésiterais pas une seconde", affirme le médecin. Peu de chance, donc que la tentative de conciliation au niveau départemental aboutisse. En cas d’échec, la plainte pourra être transférée vers les instances régionales de l’Ordre des médecins.
L’homéopathie continuera à être remboursée
Dans cette opposition entre médecins favorables aux médecines douces et ceux qui en dénoncent l’efficacité, Agnès Buzyn a pour le moment choisi son camp. Interrogée jeudi 12 avril sur RMC, la ministre de la Santé s’est dite favorable au maintien du remboursement de l’homéopathie même si elle reconnaît que celle-ci a "probablement un effet placebo".
"C’est probablement un effet placebo. Si ça peut éviter d’utiliser des médicaments toxiques, quelque part je pense que nous y gagnons collectivement. Voilà. Ça ne fait pas de mal", a-t-elle déclaré. Actuellement, l’homéopathie est en partie remboursée par la Sécurité sociale, à hauteur de 30%. Ce qui représente un coût annuel d’environ 50 millions d’euros. Plusieurs études scientifiques montrent cependant que ces traitements n’auraient qu'un effet placebo.