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Evenements traumatiques

De l’ecstasy pour soigner le syndrome de stress post-traumatique

Par Mégane Fleury

L’ecstasy, ou MDMA, permettrait de réduire le stress post-traumatique chez d’anciens soldats. C’est ce que suggère une étude réalisée aux Etats-Unis. Une méthode contestable pour soigner ce syndrome qui ne touche pas que les soldats. 

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De la drogue pour soigner des militaires ? L’idée peut sembler absurde, mais c’est l’essai qu’on mené des chercheurs américains. Ils ont testé les effets de la MDMA, ou ecstasy, sur des militaires victimes du syndrome de stress post-traumatique (SSPT). Les résultats de leur étude ont été publiés dans The Lancet Psychiatry, et selon ses scientifiques, ils sont probants.

Une réduction du SSPT

"Au moins un patient atteint du SSPT sur deux ne supporte pas les traitements actuels, ou ne réagit pas de la bonne manière à ces traitements, il y a un besoin urgent de meilleurs traitements pour les millions de vétérans militaires et toutes les personnes concernées par le SSPT", insiste Michael Mithoefer, l’un des chercheurs auteurs de cette étude. D'où leur volonté de tester l'efficacité de la drogue pour soigner le SPPT.

Les scientifiques ont testé l’effet de la molécule contenue dans l’esctasy sur les soldats, en l’accompagnant d’un suivi psychologique. 26 personnes ont participé à l’étude : parmi elles, 22 anciens militaires, trois pompiers et un policier. Tous ont suivi trois séances de psychothérapie avant de recevoir le traitement à base de MDMA. Trois doses différentes ont été administrées : 30, 75 ou 125 mg, le tout en deux séances, de huit heures chacune. Selon les chercheurs, un mois après la deuxième séance, 68% des patients ayant reçu la plus forte dose n’étaient plus en état de SSPT, contre 29% dans le groupe de ceux qui ont reçu la plus petite dose. 

Des effets bénéfiques, mais beaucoup d’effets secondaires

Ce type de "traitement" n’est pas sans danger. Plusieurs participants ont expliqué ressentir des envies de suicide, tous ont ressenti des effets secondaires: angoisses, maux de tête, tensions musculaires, insomnies. Surtout, l’étude pose des questions éthiques importantes : la MDMA demeure une drogue illégale, et est l’objet de trafics à travers le monde. On connaît ses dangers quant à la dépendance. D’ailleurs, les liens entre les drogues et le SSPT sont complexes, car si cette étude montre qu’elles peuvent dans une certaine mesure réduire les effets du syndrome, 80% des prises importantes de drogue seraient la conséquence du SSPT. 

Un traitement qui pourrait être autorisé en 2021

L’organisation à l’origine de cette recherche, la Multidisciplinaire Association for Psychedelic Studies (MAPS), a publié un communiqué sur les résultats. Elle y explique que la phase III de cet essai sera menée pendant l’été aux Etats-Unis, au Canada et en Israël. Cette fois, entre 200 et 300 personnes devraient participer. Si l’essai atteste de l’efficacité et de la sécurité du traitement, il pourrait être autorisé aux Etats-Unis en 2021. 

Les soldats ne sont pas les seuls touchés 

Mais il ne faut pas réduire le stress post-traumatique a un syndrome subi uniquement par les soldats. Au contraire, toute situation de mise en danger peut conduire à ce syndrome, qu’il s’agisse d’une tempête violente, d’une agression sexuelle ou d’un cambriolage. On estime en France que chaque année, 600 000 personnes sont victimes de SSPT.

Trois situations principales peuvent le provoquer. D’abord, les catastrophes naturelles : il est estimé que 10 à 20% des personnes touchées souffriront de stress post-traumatique. Ensuite, les catastrophes qui ont des causes humaines comme un accident de la route par exemple : dans ces cas, 20 à 40% des individus seront concernées par le SSPT. Enfin, lorsqu’il s’agit d’agressions sexuelles graves, de prises d’otage, ou de guerre, 80 à 100% des personnes seront victimes de SSPT. 

Un  syndrome mal diagnostiqué

De manière générale, trois symptômes principaux peuvent alerter : les cauchemars à répétition où l’on revit l’évènement traumatique, une vigilance ou une méfiance inhabituelle et des états dépressifs. Parfois, les personnes touchées évitent de reparler de l’accident, ou vont faire une sorte de déni.   

Pour l’heure, le stress post-traumatique demeure mal diagnostiqué et mal pris en charge dans l’hexagone. Il est estimé qu’une personne traumatisée sur deux sera prise en charge correctement pour soigner le syndrome. Or, le SSPT peut conduire à des comportements dangereux : le risque de suicide serait multiplié par 6 pour les personnes atteintes.