L’échange téléphonique rendu public par le magazine alsacien Hebd'i laisse sans voix. Souffrant de terribles douleurs au ventre et de fièvre, Naomie Musenga, 22 ans, appelle le Samu. Le dialogue avec son interlocutrice tourne alors rapidement court :
"Naomie : Aidez-moi madame.
Le SAMU : Qu’est-ce qui se passe ?
Naomie : Aidez-moi madame.
Le SAMU : Bon, si vous me dite pas ce qui se passe, je raccroche.
Naomie : Madame, j’ai très mal.
LE SAMU : Oui ben, vous appelez sos médecin, d’accord ?
Naomie : Je peux pas, je vais mourir.
Le SAMU : Oui vous allez mourir certainement un jour, comme tout le monde."
Défaillance multiviscérale sur choc hémorragique
La professionnelle de santé du SAMU est non seulement cassante, méprisante, anxiogène et visiblement très agacée, mais elle commet une faute grave en raccrochant trop vite sans envoyer d’ambulance à sa patiente. Toute seule chez elle, Naomi devra attendre cinq heures pour être prise en charge par SOS Médecins, qui l’enverra finalement à l’hôpital. La jeune femme y décédera le 29 décembre dernier, victime d’un infarctus. Le rapport d'autopsie indique que la jeune femme est morte des suites d'une "défaillance multiviscérale sur choc hémorragique" (plusieurs organes s'étaient arrêtés de fonctionner, NDLR).
Persuadée qu'une prise en charge rapide aurait sauvée Naomie, sa famille a écrit au procureur pour que la justice se saisisse de l'affaire. Les hôpitaux universitaires de Strasbourg dans lesquels Naomie s’est éteinte ont également ouvert une enquête administrative, tandis que la ministre de la Santé a demandé une autre enquête à l'inspection générale des affaires sociales (IGAS).
"Je suis profondément indignée par les circonstances du décès de Naomi Musenga en décembre. Je tiens à assurer à sa famille mon entier soutien et demande une enquête de I'IGAS sur ces graves dysfonctionnements. Je m'engage à ce que sa famille obtienne toutes les informations", a déclaré Agnès Buzin sur Twitter, avant d’ajouter "qu'une réunion à ce sujet se tiendra dans les jours qui viennent au ministère".
Je suis profondément indignée par les circonstances du décès de Naomi Musenga en décembre. Je tiens à assurer sa famille de mon entier soutien et demande une enquête de I'IGAS sur ces graves dysfonctionnements. Je m'engage à ce que sa famille obtienne toutes les informations .
— Agnès Buzyn (@agnesbuzyn) 8 mai 2018
Trouver des solutions aux problèmes de régulation médicale
"Les moyens doivent être mis en place pour avoir des régulations médicales modernes et répondant à des critères de qualité", ont quant à elles insisté l'Association des médecins urgentistes de France (AMUF) et Samu urgences de France (SUDF), se disant "profondément attristées par ce qui s'est passé à Strasbourg". "La prise en charge des appels relevant tant de la santé (Samu) que des secours (Pompiers) doit être moderne et traitée de façon rigoureuse par les professionnels dont c'est le métier", affirment-elles.
Les organisations de médecin urgentistes ont demandé mardi "un rendez-vous immédiat" avec la ministre de la Santé "pour trouver des solutions aux problèmes de régulation médicale afin qu'un tel drame ne se reproduise pas".