En moyenne, un médecin se suicide tous les jours aux États-Unis. Cette statistique préoccupante est issue d'une nouvelle étude présentée lors de la réunion annuelle 2018 de l'American Psychiatric Association. Les travaux- qui n'ont pas encore fait l'objet d'une publication- se focalisent sur le nombre de suicides parmi les professionnels de la santé aux États-Unis, métier au sein duquel le taux suicide demeure le plus élevé.
Les scientifiques ont réalisé une méta-analyse des études publiées au cours des dix dernières années afin de déterminer s'ils pouvaient comprendre pourquoi les taux étaient si élevés, ainsi que de mesurer l'efficacité des interventions mises en place pour réduire le nombre de suicides à l'hôpital. Ils ont constaté qu'entre 28 et 40 médecins pour 100 000 par an meurent par suicide aux États-Unis, ce qui en chiffres bruts, représente entre 300 et 400 suicides par an.
Les chercheurs ont été surpris de constater que les taux de suicide chez les médecins étaient encore plus élevés que chez les militaires, qui est pourtant considéré comme l'un des emplois les plus stressants. En revanche, le taux annuel de suicide ajusté en fonction de l'âge chez tous les Américains était de 13,42 décès pour 100 000 personnes en 2016.
La peur d'être stigmatisé conduit au suicide
Afin de comprendre pourquoi le nombre de suicides est si élevé chez les médecins, les auteurs de l'étude ont analysé différents facteurs. Selon eux, l'une des principales causes de ce fléau est la peur de la stigmatisation liée au diagnostic de troubles mentaux.
En effet, leurs recherches ont démontré qu'un grand nombre de médecins souffraient de dépression ou de maladies mentales non traitées ou sous-traitées, car ces derniers se montrent particulièrement réticents à demander de l'aide.
D'après les chercheurs, le fait d'avoir la connaissance et l'accès à des substances mortelles dans leur travail quotidien peut également expliquer le taux de mortalité plus élevé au sein de cette profession.
Vers une intervention plus efficace et plus précoce
Plusieurs interventions ont été tentées pourréduire le nombre de suicides, comme les programmes de santé offerts par les hôpitaux. Mais à ce jour, aucune d'entre elles ne semble avoir fonctionné, notent les chercheurs.
"Pour réduire le nombre de médecins qui se suicident, il faut s'attaquer à la peur de la stigmatisation et aux autres facteurs de risque en menant davantage de recherches visant à une intervention plus efficace et plus précoce", estiment les auteurs de l'étude.
Un quart des soignants français a déjà eu des idées suicidaires
En France, la situation des médecins demeure également inquiétante. Une récente enquête de l'association Soins aux Professionnels de Santé (SPS) a révélé qu'un quart des soignants a déjà eu des idées suicidaires du directement imputables à leur carrière.
Sur la moitié des 700 professionnels de santé interrogés (médecins, pharmaciens, infirmiers, aides-soignants, salariés comme libéraux), plus de 40% d’entre eux disent connaître un confrère qui a fait une tentative de suicide. En moyenne, chaque professionnel de santé rapporte ainsi près de 2,5 tentatives dans son entourage, dont la moitié a abouti à un décès.