Face à l’urgence de la situation, la République démocratique du Congo (RDC) a tranché : dès le mardi 22 mai, un vaccin expérimental contre Ebola sera déployé dans le pays pour éradiquer l’épidémie qui sévit actuellement dans le nord-ouest du pays. Depuis début avril, la région de Bikoro, très reculée et majoritairement rurale est touchée par le virus Ebola. Au total, une quarantaine de cas dont 23 décès ont été recensés entre le 4 avril et le 9 mai. D’après Le Monde, trois foyers de contamination ont été repérés et près de 400 personnes ayant été en contact avec les malades ont été placées en observation.
Un premier cas de fièvre hémorragique a par ailleurs été découvert en zone urbaine, à Mbandaka (1 million d’habitants), dans le nord-ouest du pays. "Un nouveau cas (…) a été confirmé à Wangata, l’une des trois zones sanitaires de Mbandaka, une ville de près de 1,2 million d’habitants de la province de l’Equateur, dans le nord-ouest de la RDC", a déclaré l’Organisation Mondiale de la Santé.
C’est face au risque de propagation vers les villes densément peuplées comme la capitale Kinshasa (11, 5 millions d’habitants) que les autorités ont donné le feu vert à l’Organisation mondiale de la santé (OMS) pour expédier les premières doses du vaccin. "Si une ville de cette taille est gagnée par la maladie d’Ebola, il y aura un important foyer urbain, ce qui sera un vrai défi", a déclaré au Monde Peter Salama, qui pilote les opérations d’urgence à l’OMS."Lorsque Ebola gagne des zones urbaines, notamment des bidonvilles, il est extrêmement difficile de venir à bout de la maladie."
Un vaccin testé avec succès en 2015 en Guinée
Connu sous le nom de code V920, le vaccin a été mis au point par la laboratoire Merck en 2016. Administré en dose unique, il s’est jusqu’ici avéré concluant lors d’essais cliniques sur les humains, mais n’a pas encore reçu d’autorisation de mise sur le marché (AMM). Il a en revanche été testé avec succès en 2015 en Guinée, alors que l’épidémie d’Ebola en Afrique de l’Ouest a causé plus de 11 000 morts, touchait à sa fin.
Publiés en 2017 dans la revue The Lancet, les résultats du vaccin V920 laissent espérer une fin de l’épidémie en RDC. En effet, sur les 6 000 personnes vaccinées, dont 200 enfants, aucun n’a contracté la maladie dans les semaines suivant la vaccination. En revanche, les chercheurs reconnaissent ne pas connaître la durée de protection conférée par le vaccin.
4 000 doses de vaccin acheminées
L’objectif désormais des autorités compétentes est de "casser les chaînes de transmission" d’Ebola, explique le professeur Denis Malvy, spécialiste des maladies infectieuses et tropicales au CHU de Bordeaux. Il faut donc tracer et isoler toutes les personnes avec lesquelles les malades ont été en contact afin qu’elles puissent recevoir en priorité le vaccin avec le personnel soignant.
À l’heure actuelle, l’OMS dispose de 4 000 vaccins qui seront, dès la semaine prochaine, acheminés par un pont aérien dans la région de Bikoro. Au moins 300 000 autres doses du vaccin V920 sont disponibles et seront prochainement expédiées en RDC. Elles constituent un stock d’urgence mis en place début 2016 par Merck et Gavi, une organisation internationale qui veut favoriser l’accès aux vaccins dans les pays en développement. Le défi logistique est désormais de transporter le vaccin et de le stocker tout en respectant la chaîne du froid : il doit en effet être conservé à -80 °C.
Les chaînes de transmission d'Ebola
Le RDC avait officiellement annoncé la fin de l'épidémie Ebola sur son sol en juillet dernier. Ce nouveau foyer est le neuvième à se déclarer dans le pays depuis 1976. L'Institut Pasteur s'est mobilisé était parvenu à reconstruire les chaînes de transmission du virus Ebola et leur contexte, au sein de la capitale guinéenne en 2015. Ce travail d’enquête mené auprès des patients, de leurs familles et de leurs voisins, a permis de mesurer la transmission d’Ebola entre individus dans différents contextes et à différents moments de l’épidémie.
Illustration : Arbres de transmission du virus Ebola. Dans les cercles sont inscrites les dates de début de symptômes pour les cas ayant infectés plus de 3 personnes. La taille des cercles est proportionnelle au nombre de personnes que le cas a infecté. Source : Institut Pasteur