En juin 2011, à l'hôpital Ambroise-Paré de Boulogne (Hauts-de-Seine), deux médecins ont placé dans le fémur de quatre patients des tiges métalliques portant un biorevêtement antibactérien. Problème : une telle expérimentation sur l'homme nécessitait des autorisations que le laboratoire Ceraver n'avait pas. De plus, là où le dossier devient plus inquiétant, c’est que les essais cliniques de ces nouvelles prothèses sur l'animal se seraient soldés par la mort de deux souris. Alors, même si à l'heure actuelle il semble difficile d'évaluer, le degré de culpabilité des principaux acteurs qui se renvoient la balle, une chose est sûre, les essais cliniques répondent en France à des procédures précises et bien encadrées. Et, « ne pas les respecter, serait une faute extrêmement grave pour la sécurité des patients », c'est ce que nous explique le Pr Eric Vicaut, Directeur du Centre d’Évaluation du Dispositif Médical à l’hôpital Fernand Widal.
Tout d'abord, de multiples autorisations sont nécessaires aux laboratoires, avant de pouvoir procéder à des essais sur l'homme. D'autre part, le patient doit être averti des résultats antérieurs des études cliniques qui ont été menées.
Ecoutez le Pr Eric Vicaut, directeur du Centre d’évaluation du dispositif médical à l’hôpital Fernand Widal: « Ces essais doivent être approuvés par l'Agence du médicament et le Comité de protection des personnes avant de pouvoir se faire sur l'homme. Si ça n'a pas été fait, c'est un manquement extrêmement grave aux bonnes pratiques qui concernent les études cliniques...»
De plus, lorsque des incidents surviennent durant les essais cliniques sur les animaux, les choses peuvent changer. Les délais d'autorisation pour le passage à des essais sur l'homme deviennent en général plus longs. Et dans certains cas, l'Agence du médicament pourra même refuser ces tests.
Ecoutez le Pr Eric Vicaut: « Si on a des problèmes dans le dossier pré-clinique, il est probable que l'Ansm demandera des compléments d'information. Elle pourra même refuser éventuellement le passage à l'utilisation chez le patient... »
Enfin, s'agissant de l'autre volet de l'affaire, dans lequel le laboratoire Ceraver aurait vendu des prothèses qui n’avaient pas reçu la certification « CE » indispensable depuis 2009 et qui touche quelque 650 patients qui seraient porteurs de ces prothèses, là encore le Pr Eric Vicaut appelle à « un renforcement des contrôles », qui restent d'après lui toujours « insuffisants ».
Ecoutez le Pr Eric Vicaut: « Concernant le contrôle de l'utilisation des dispositifs médicaux dans les établissements de santé, il doit être encadré de manière beaucoup plus stricte que ce qui est fait actuellement...»
Quoi qu'il en soit, l'affaire des prothèses de hanche non conformes est en train de connaître de rapides développements. Près d'un millier de prothèses de la hanche non certifiées fabriquées par la société Ceraver ont d'ores et déjà été placées sous séquestre en attendant une décision formelle de police sanitaire la semaine prochaine, a indiqué ce jeudi François Hébert, directeur général adjoint de l'Agence du médicament (ANSM). Il souligne par ailleurs, qu'à ce stade, rien ne démontre « un risque sanitaire» lié à ces dispositifs.