On sait que la décision est dans les tuyaux de l’Assurance maladie. Même l’industrie pharmaceutique n’y croit plus. Avant même que l’annonce ne soit faite par le ministère de la Santé, un des fabricants vient de retirer du marché un de ces médicaments… Les autres attendent, sans se battre, ce qui est un signe évident d’abandon.
Pourtant, le marché était faramineux. On ne connait pas le nombre exact de malades à traiter, car de nombreux ne sont pas diagnostiqués et étiquetés en « démence de la vieillesse », mais l’association France Alzheimer déclare qu’ « aujourd’hui en France, près de 3 millions de personnes sont directement ou indirectement touchées par la maladie d’Alzheimer. De jour en jour, la maladie gagne du terrain : près de 225 000 nouveaux cas sont diagnostiqués chaque année. D’ici 2020, notre pays comptera probablement 1 200 000 personnes malades. »
L’espoir était venu, il y a plus de 20 ans, d’une nouvelle classe : inhibiteurs de l'acétylcholinestérase. Ce sont eux qui sont aujourd’hui sur la sellette.
La théorie : ils inhibent la dégradation de l’acétylcholine, la substance qui permet la transmission entre les neurones du cerveau, et dont on avait mis en évidence un déficit dans le cerveau des personnes atteintes de cette maladie. Une hypothèse vérifiée et sérieuse… Mais qui n’explique probablement la genèse de la maladie. Au début, les études ont montré que, bien que modestes, leurs effets étaient significativement supérieurs à ceux du placebo et provoquaient un ralentissement ou retard du déclin cognitif et de la perte d'autonomie. La revue Prescrire écrivait : « leurs effets sont modestes, de quelques mois, chez environ 10 % des patients ». Il est probable que la vérité ait été en dessous de cette évaluation déjà pessimiste.
Pourquoi les médecins ont-ils continué à prescrire ces médicaments devant tant d’évidences ?
Tout simplement parce que c’est une maladie qui touche tout l’univers du patient. Celui qui en souffre l’oublie assez rapidement mais l’entourage vit des moments difficiles, avec souvent le seul soutien psychologique du médecin de famille, qui est alors tenté de soulager la plainte par une prescription… Personne ne saurait réellement le blâmer… Mais il va falloir se rendre aujourd’hui à l’évidence que c’est un coup d’épée dans l’eau.
Les solutions
Il est clair que la recherche de l’industrie pharmaceutique bloque devant cette maladie. Les différentes pistes thérapeutiques aboutissent à des impasses lorsque l’on passe à la phase pratique des essais chez l’homme. On sait que les circuits du cerveau sont englués par une sorte de colle, une protéine, qui progressivement étend son action aux neurones du cerveau. L’empêcher d’arriver ou au pire la freiner est la solution. Les essais se poursuivent avec de nouvelles hypothèses, sur le mécanisme chimique de la mémoire par exemple, mais la mise au point d’un médicament est longue, du moins à l’échelle de la vie d’un malade diagnostiqué. Il faut laisser encore un peu de temps à la recherche qui reste mobilisée et sans pouvoir donner de dates précises est résolument optimiste.
En attendant des médicaments, il existe plusieurs domaines pour lesquels la mobilisation doit rester importante.
La prévention
Sans savoir réellement prévenir la maladie, on sait qu’on dispose de moyens de la ralentir significativement. En jouant sur l’exercice physique (les preuves sont évidentes), la diététique (de nombreuses substances sont toxiques pour le cerveau) et surtout la gymnastique cérébrale qui se résume en un entretien permanent des capacités du cerveau, en particulier la mémoire, si possible tout au long de sa vie. Pas de solutions miracles et surtout demandant un effort pour ceux qui les mettent en œuvre, mais de vraies preuves d’efficacité.
Le dépistage précoce
La plupart des malades sont diagnostiqués trop tard et les mesures énergiques de préventions mises trop tardivement en place. Les médecins ont fait des progrès considérables ces 20 dernières années, mais encore faut-il que les premiers troubles de la mémoire soient explorés par des spécialistes. Pousser la porte d’une consultation mémoire n’est pas un acte honteux. Les médecins de famille doivent être vigilants et aborder le sujet le plus rapidement possible ; tout comme l’entourage qui ne doit pas hésiter à aborder le sujet.
La gestion de la maladie
S’occuper d’un Alzheimer est éreintant et coûteux. C’est en ce sens que le déremboursement des médicaments peu utiles est une façon de faire des économies qui vont pouvoir être consacrées à l’aide aux familles de malades, pour augmenter les structures et le personnel d’aide. Ce n’est souvent que par souci financier que l’entourage épuisé ne fait pas appel à des solutions extérieures… Ce qui à terme augmente encore la facture par effets collatéraux.
La maladie d’Alzheimer, un vrai défi de santé publique à très court terme.