Alors que cette addiction touche désormais toutes les catégories sociales, le CHU de Tours recherche des volontaires supplémentaires pour compléter les tests d'un nouveau traitement contre l'alcoolisme, rapporte France Bleu Touraine à l'occasion de la 9e journée interrégionale d'alcoologie-addictologie organisée par le collectif d'alcoologie en Indre-et-Loire.
Consommation à risque d'alcool
Après avoir fait le test de dépendance à l’alcool de l’OMS, 30,7% des hommes de 18 à 35 ans ont récemment déclaré avoir un niveau de risque élevé, voire dangereux pour 5,8% d’entre eux. C'est dans cette même catégorie d'âge que l’on retrouve la plus grande proportion de femmes ayant des comportements "dangereux" (12,9%) et problématiques (1,6%) vis-à-vis de leur consommation d’alcool.
Selon les premiers résultats d'une étude présentée dans le cadre de la 3e journée nationale de prévention des conduites addictives au travail, ce sont désormais les cadres qui présentent le plus haut pourcentage de consommation à risque d'alcool (11,7%) chez les femmes, bien devant les ouvrières et artisans (8,6%). Près de 23% des hommes travaillant dans des professions intermédiaires (enseignants, infirmiers, techniciens…) présentent des taux élevés de consommation à risque d'alcool, c'est-à-dire risquée pour la santé physique ou psychique de la personne, et ayant un impact sur sa vie personnelle.
Stimulation transcranienne à courant continu
"Contrairement aux idées reçues, tout le monde est touché, et pas seulement les ouvriers dans l'industrie, pour le dire de manière un peu triviale", explique Guillaume Airagnes, psychiatre addictologue à l'hôpital Georges-Pompidou à Paris et doctorant à l'Institut national de la santé et de la recherche médicale (Inserm).
Le CHU de Tours a mis au point un nouveau traitement contre l’alcoolisme. La technique, qui s'appelle "stimulation transcranienne à courant continu", équivaut à une stimulation électrique du cerveau. "Le premier symptôme qui apparaît dans l'addiction à l'alcool, c'est la perte de contrôle, c'est-à-dire que quand j'ai décidé que je ne boirai pas, je bois quand même", explique le docteur Hussein El-Ayoubi, en charge de l'expérimentation. "C'est le cortex préfrontal qui, à force de répéter le comportement de consommer de l'alcool, perd le contrôle sur la zone des émotions, la zone de la mémoire, la zone du plaisir. Le but de la stimulation transcranienne à courant continu est de restimuler cette zone chez les patients addicts à l'alcool."
Cortex préfrontal
Concrètement, deux fois par semaine, des électrodes renforcent le cortex préfrontal des volontaires, de manière à stimuler la zone du cerveau qui prend des décisions. Les séances, indolores, durent 13 minutes. Les premiers résultats semblent indiquer que les patients dépendants de l’alcool arrivaient mieux à dire "non" à la boisson.
"C'est un traitement novateur dans le sens où il agit sur une zone du cerveau où l'on n'a pas de médicaments", explique encore le Dr Hussein El-Ayoubi à France Bleu Touraine. "J'ai vraiment tendance à croire à ce type de traitement car il y a déjà des effets positifs au CHU de Tours auprès des volontaires qui l'expérimentent depuis février", assure-t-il. Si les résultats, disponibles fin 2019, sont effectivement concluants, la stimulation du cerveau pourrait devenir la troisième voie de traitement de la dépendance à l'alcool, après les médicaments et la psychothérapie.
Actuellement, une dizaine de personnes se sont portées volontaires à Tours, et une centaine sur toute la France. Les médecins espèrent en recruter 340 au total.