Encore méconnue en France, la sclérose en plaques fait l’objet ce mercredi 30 mai d’une Journée mondiale. L’objectif d’un tel évènement : sensibiliser le grand public à cette maladie auto-immune du système nerveux central, qui touche environ 100 000 personnes en France et dont 3 000 à 5 000 nouveaux cas sont diagnostiqués chaque année. Car la sclérose en plaques est loin d’être une maladie rare. Deuxième maladie neurodégénérative après la maladie d’Alzheimer, elle constitue la première cause de handicap chez l’adulte jeune après les accidents de la route.
Une maladie multifactorielle
La sclérose en plaques est due à un dérèglement du système immunitaire, qui s’attaque au cerveau et aux fibres nerveuses en détruisant les gaines de myéline chargées de protéger les neurones. Peu à peu, les patients perdent l’usage de leurs membres, présentent des troubles de la vision, de la motricité et de la sensibilité.
Handicapante sans être mortelle, la sclérose en plaques est une maladie chronique qui se manifeste par des poussées inflammatoires entrecoupées de phases d’accalmie. Durant celles-ci, la myéline se reconstitue en partie mais, à terme, un handicap irréversible peut s’installer.
"Il n’y a pas un facteur déclenchant unique de la sclérose en plaques. C’est une maladie multifactorielle, qui ne se déclenche pas autour d’une cause unique : c’est un concours de circonstances", nous explique le Pr Jérôme de Sèze, neurologue au CHRU de Strasbourg. "On sait qu’il y a probablement une stimulation du système immunitaire chez les gens prédisposés aux maladies auto-immunes comme le diabète ou la sclérose en plaques. Mais il n’y a pas une cause unique. La maladie survient souvent chez des gens de race blanche, chez les femmes, plutôt jeunes, vivant dans les pays industrialisés."
Une maladie de plus en plus féminine
La sclérose en plaques est d’autant plus handicapante pour la vie sociale qu’elle touche des patients jeunes, entre 20 et 40 ans. C’est aussi une maladie féminine : en moyenne, elle survient chez deux femmes pour un homme. Comment l’expliquer ? Pour le Pr De Sèze, le facteur hormonal y est pour beaucoup. "On sait que les hormones jouent un rôle important dans le déclenchement de la sclérose en plaques. Quand les femmes sont enceintes, elles ont très peu de poussées de la maladie et à l’inverse après l’accouchement, elles en ont beaucoup car leur taux d’hormones chute. Il faut aussi rappeler que la grande majorité des maladies auto-immunes sont à prédominance féminine."
Et la tendance n’est pas prête de s’inverser : selon les chercheurs, les femmes ayant un mode de vie urbain sont de plus en plus concernées par la sclérose en plaques. "Aujourd'hui on compte trois femmes atteintes pour un homme, contre deux femmes pour un homme dans les années 50-60. C'est une vraie révolution épidémiologique", explique à l'AFP le neurologue Thibault Moreau, de la fondation française Arsep (Aide à la recherche sur la sclérose en plaques), cité par FranceInfo.
Un changement des modes de vie des femmes
En cause : un changement des habitudes de vie des femmes. Ces quarante dernières années, ces dernières ont conquis le droit de recourir à la contraception. Elles ont aussi adapté un mode de vie plus urbain, vivent en ville, fument plus... Autant de facteurs qui peuvent expliquer pourquoi la maladie les touche davantage. "Afin de mieux comprendre d’où vient cette augmentation de la sclérose en plaques chez les femmes, il faut trouver des causes qui ne touchent que cette population. Ce que l’on a identifié ces vingt dernières années, c’est en effet plus de tabagisme, qui augmente d’environ deux fois le risque de développer une sclérose en plaques, détaille le Pr De Sèze. Les modifications hormonales induites par l’usage de la contraception, de même que le fait d’avoir des enfants plus tard jouent aussi un rôle (dans le déclenchement de la maladie, ndlr)."
Autres facteurs de risques : un niveau d’ensoleillement plus bas, un changement d’alimentation, l’obésité. Les chercheurs ignorent toutefois encore dans quelle mesure ces facteurs, environnementaux et génétiques, jouent un rôle dans le déclenchement de la maladie. "Vous pouvez réunir tous ces critères et fort heureusement ne pas déclencher de sclérose en plaques. Et à l’inverse, elle peut toucher des populations moins ciblées", rappelle le Pr De Sèze.
Encore incurable, la sclérose en plaques a bénéficié d’avancées significatives de la recherche. "De véritables progrès thérapeutiques ont été réalisés ces vingt dernières années dans le domaine de la sclérose en plaques. Il faut rappeler qu’il n’existait aucun traitement il y a vingt ans. Aujourd’hui, nous disposons de huit traitements différents s’adressant à différents cas qui permettent de réduire le nombre de poussées chez les patients et donc de reculer la survenue du handicap. Là en revanche où l’on doit s’améliorer, c’est dans notre capacité à recréer de la myéline là où elle a été altérée. C’est le défi de la recherche pour les prochaines années."