L’ablation des amygdales est un acte très courant. Chez les enfants et les adolescents, on dénombre environ 35 000 opérations de ce type en France (HAS, 2010). Mais de nouvelles données pourraient conduire à réévaluer l'intérêt de cette intervention. D’après une étude danoise publiée dans Jama ORL, retirer les amygdales chez l’enfant provoquerait une augmentation des infections à long terme.
Les chercheurs ont étudié les données issues d’une cohorte de presque 1,2 millions de jeunes Danois en bonne santé, dont 5 % avaient subi un retrait des amygdales ou des végétations dans l’enfance (avant neuf ans). En compilant les données d’hospitalisation jusqu’à 30 ans après leur naissance, les chercheurs ont montré que le risque infections respiratoires était multiplié par deux (végétations) ou trois (amygdales) dans les années suivant l’opération.
1 infection pour 5 enfants traités
Asthme, grippe, pneumonie, bronchite chronique : les conséquences à long terme d’une opération des amygdales ne sont donc pas négligeables, au regard des bénéfices à court terme. "Il suffit d’opérer cinq personnes des amygdales pour obtenir une maladie respiratoire en plus", indique le Pr Jacobus Boomsma (université de Copenhague), qui a dirigé la recherche. Un ratio conséquent, qui invite sans doute à pratiquer l’opération avec plus de parcimonie.
Les amygdales et les végétations sont de petits amas présents derrière la langue et au niveau du pharynx. Chez les enfants, il n’est pas rare qu’ils gonflent et deviennent des foyers infectieux, occasionnant des angines à répétitions et des apnées du sommeil. Le retrait des amygdales ou végétations, réalisé par un chirurgien ORL en ambulatoire, permet de régler ce problème.
Un maillon immunitaire important
Mais les amygdales et les végétations, comme les ganglions lymphatiques, sont un des maillons du système immunitaire. Placées au début des voies respiratoires, elles mettent en contact les bactéries et les virus avec les cellules de l’immunité. Elles sont donc utiles pour initier une réponse immunitaire, mais aussi pour apprendre à l’organisme à reconnaitre les agents pathogènes en vue de futures infections, a fortiori au début de la vie.
Peu considéré jusqu’à récemment, l’impact immunitaire à long terme lié à l’ablation des amygdales et des végétations s’avère donc loin d’être négligeable. Pour le Dr Sean Byers (université de Copenhague), deuxième auteur sénior de l’étude, il vaut ainsi mieux retarder le retrait des amygdales lorsque c’est possible, afin de " favoriser un développement normal du système immunitaire".
Moins douloureuse et plus sûre que le retrait total, l’ablation partielle des amygdales tend à se généraliser ces dernières années, notamment pour traiter les apnées obstructives du sommeil (80 % des indications). La reconnaissance du rôle immunitaire des amygdales pourrait contribuer à accentuer cette évolution.