Les résultats d'une étude de 23 ans présentée au congrès européen de rhumatologie (Abstract OP0015), l’EULAR 2018, suggèrent qu'un traitement précoce et intensif de la polyarthrite rhumatoïde (PR) présente des avantages sur le long terme, avec notamment, une normalisation des taux de mortalité qui reviennent à des niveaux comparables à ceux de la population générale.
« Nos résultats confirment qu'un traitement précoce et intensif de la polyarthrite rhumatoïde, y compris l'utilisation de corticoïdes, a des avantages à long terme », a déclaré le professeur Maarten Boers, du Centre médical universitaire VU, Amsterdam, et auteur de l'étude. « Fait important, cette étude est l'une des premières à montrer une normalisation de la mortalité dans la PR par rapport à la population générale après 23 ans de suivi ».
Une surmortalité au cours de la PR
La polyarthrite rhumatoïde est une maladie inflammatoire chronique qui affecte les articulations d'une personne, causant douleur et handicap. Elle peut également affecter les organes internes (poumon, cœur, rein). La mortalité chez les malades soufrant de PR est plus élevée que dans la population générale.
De nombreux progrès ont été réalisés dans le traitement, ce qui a été associé une réduction des complications de la maladie, mais les preuves d'une amélioration des taux de mortalité restaient discutables.
« Nous savons que les effets néfastes de la polyarthrite rhumatoïde sur le corps ne deviennent vraiment apparents qu'après plus d'une décennie », a déclaré le professeur Robert Landewé, président du Comité du programme scientifique de l'EULAR. « Par conséquent, il est vraiment intéressant de voir ces données soutenir le traitement intensif précoce après une si longue période de suivi ».
23 ans de suivi de l’étude COBRA
Cette étude prospective a analysé les taux de mortalité après 23 ans de suivi de l'étude COBRA (COmbinatietherapie Bij Rheumatoide Artritis) qui était une étude de traitement intensif précoce. Dans l'étude initiale, des malades atteints de PR précoce ont été traités, soit par une monothérapie par la sulphalasazine, soit par une combinaison de sulphalasazine et de méthotrexate à faible dose, avec de la prednisolone au début.
Les résultats initiaux avaient montré que le traitement combiné apportait un contrôle supplémentaire de la maladie par rapport à la sulphalasazine seule. En 2010, après 11 ans de suivi, il avait été observé également une réduction numérique de la mortalité (mais pas significativement) chez les malades sous traitement combiné par rapport aux patients sous sulphalasazine en monothérapie.
L’étude actuelle a analysé les données de 154 des 155 patients originaux avec un temps de suivi moyen de 23 ans (chez ceux qui ne sont pas morts). À l'aide d'un échantillon de référence apparié pour l'âge et le sexe, les chercheurs ont démontré une mortalité numérique (44/154, 28%) inférieure à celle de la population générale (55/154, 35%).
Réduction des lésions articulaires et du recours aux prothèses articulaires
Les résultats de deux autres études présentées également au Congrès européen annuel de rhumatologie (SAT0077 et OP0116) montrent qu’entre 1997 et 2010, la mise en place des prothèses totales de hanche a diminué de moitié (-51,9% ; p <0,001) chez les malades les plus âgés avec la polyarthrite rhumatoïde la plus sévère.
Ces données portant sur environ un million de personnes sont issues du Registre des produits biologiques de la Société britannique de rhumatologie pour la polyarthrite rhumatoïde (BSRBR / RA).
Les taux d'interventions cardiaques n'ont pas changé significativement au fil du temps dans les deux groupes, ce qui suggère que les changements observés dans la chirurgie prothétiques étaient dus à des améliorations dans le traitement de la PR plutôt qu'à un défaut d'accès à la chirurgie.
PR : amélioration nette de la prise en charge
La prise en charge de la PR a considérablement progressé au cours des 25 dernières années, passant d’un traitement surtout palliatif à des schémas thérapeutiques ayant un impact réel sur l'activité de la maladie.
Cette évolution a été multifactorielle, avec en particulier une meilleure utilisation ressources thérapeutiques déjà disponibles, mais aussi la mise à disposition des thérapies biologiques comme les anti-TNF.
« Nous nous félicitons de ces résultats qui démontrent une telle réduction des arthroplasties chez les patients atteints de PR au cours des dernières années », a déclaré le professeur Robert Landewé, président du Comité du programme scientifique, EULAR. « Il est également très intéressant de voir des données concernant spécifiquement l'impact des traitements biologiques sur ce résultat étant donné l'ampleur des progrès dans la prise en charge de la PR au cours de la même période ».