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Reconstruction

Exstrophie vésicale : un homme né sans pénis va enfin pouvoir faire l’amour grâce à une greffe

Par Mathilde Debry

Né sans verge, Andrew Wardle, 44 ans, a bénéficié d'une reconstruction du pénis réussie. Ce patient britannique souffrait d'exstrophie vésicale.

vchal / stock

"J’ai passé 44 ans sans pénis, et je me suis débrouillé sans avoir fait l’amour. Il va me falloir du temps pour m’habituer à ce genre de choses et m’y mettre". Né sans verge, Andrew Wardle, 44 ans, va bientôt pouvoir avoir les premières relations sexuelles avec sa compagne grâce à son nouveau pénis. Ce Britannique souffre d’exstrophie vesicale, c’est-à-dire du développement incomplet de la vessie et de la paroi abdominale située sous le nombril.

Exstrophie vésicale

Dans l'exstrophie vésicale (un cas sur 10 à 30 millions de naissances), la vessie, inachevée, s'ouvre directement sur la paroi abdominale, entre le nombril et le pubis, l'urine s'écoulant alors directement à l'extérieur. D'autres malformations sont souvent associées à cette malformation congénitale : épispadias (positionnement anormal de l'orifice de l'urètre) chez le garçon, clitoris divisé chez la fille, disjonction entre les deux os iliaques formant la symphyse pubienne, aplasie (développement incomplet) du sphincter urétral.

Andrew Wardle est ainsi né sans pénis mais avec des testicules. L’homme a pu bénéficier d’une opération à 57 000 euros, réalisée à l’Hôpital universitaire de Londres par l’urologue David Ralph. "Elle consiste en un prélèvement musculo-aponévrotique sur l'avant-bras (gauche pour un droitier et inversement) avec ses vaisseaux sanguins et ses nerfs. Avec ce greffon, on fabrique un nouvel urètre qui est entouré d'un manchon musculaire dans lequel on placera un implant gonflable en silicone pour obtenir la rigidité", explique le chirurgien et sexologue Ronald Virag dans le Nouvel Obs.

Les risques de complications sont nombreux

Une opération de reconstruction du pénis dure une dizaine d’heures, et les risques de complications sont nombreux : nécrose du pénis (qui nécessite alors une ablation), formation de caillots de sang, infection, hématome… Comme Il s’agit de la même opération que celle subie par les transgenres qui souhaitent une réassignation sexuelle, Jeffrey B. Friedrich, docteur à l’Université de Wasgington, aux Etats-Unis, et ses collègues, ont analysé les résultats de cinquante études relatives à la phalloplastie. Une partie concernait des changements de sexe, une autre des personnes de sexe masculin.

La principale différence entre les deux groupes concerne les complications liées à l’urêtre. Sur 869 patients transgenres, 39,4% d’entre eux en ont subies, contre 24,8% pour les patients "cisgenres" (sur 482). Selon le Dr Friedrich, la reconstruction serait plus difficile chez des patients qui n’avaient pas de pénis auparavant. De plus, il y aurait moins de complications lorsque la formation de l’urêtre, ou urétroplastie, se fait en une fois et pas en plusieurs.

"Un homme sans pénis demeure un homme"

Cependant et malgré les risques, "un homme sans pénis demeure un homme. Si on a le malheur de constater une telle malformation chez un nouveau-né, par ailleurs viable, il faut absolument éviter, ce qui était prôné auparavant, de le transformer en petite fille, car son cerveau masculinisé ne le supporterait pas", rappelle Ronald Virag. Selon une étude rétrospective, les nouveaux-nés sans pénis qui ont subi des ablations des testicules ont tout de même développé des modes de vie masculins.

Dans ce genre de cas, l’opération de reconstruction du pénis est aussi nécessaire pour éviter les suicides. En 2012, le handicap d’Andrew Wardlelui rongeait tellement la vie qu’il a tenté de mettre fin à ses jours.  Il est aujourd’hui en contact avec plusieurs hommes dans son cas, majoritairement suicidaires. "Je suis très excité de pouvoir aller de l’avant. Bien sûr, je me réjouis. Mais pour moi, ce n’est pas une fin en soi. C’est le résultat d’une opération qui va me permettre de me sentir comme faisant partie de la société", analyse le Britannique.

Rappelons pour finir que cette opération, très rare, n’est pas une première. Un homme s’était déjà fait implanter un pénis bioniqueil y a deux ans.