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Lovastatine

Cholestérol : Alfred Alberts, l’un des pères des statines, meurt à l’âge de 87 ans

Le biochimiste américain Alfred Alberts vient de décéder à l’âge de 87 ans. Méconnu, il est pourtant à l’origine du premier médicament anticholestérol du monde, la lovastatine.

Cholestérol : Alfred Alberts, l’un des pères des statines, meurt à l’âge de 87 ans Capture d'écran / Twitter / @TheScientistLLC




Il vient de s’éteindre à l’âge de 87 ans, dans le Colorado. Selon le New York Times, qui lui consacre un portrait, Alfred Alberts a été accueilli comme un héros à l’hôpital, quand les soignants ont su qu’ils avaient devant eux l’inventeur d’un des médicaments les plus connus au monde. Le biochimiste américain est à l’origine de la première statine commercialisée : la lovastatine.

Dans les années 70, la prévention des infarctus et des AVC se limite à des conseils sur le mode de vie et à quelques molécules à l’efficacité limitée. Grâce notamment aux travaux de Brown et Goldstein à l’université du Texas, récompensés par le prix Nobel de médecine en 85, on sait que le cholestérol – dans sa variante LDL, le "mauvais" cholestérol – induit la formation de plaques dans les artères, ce qui augmente le risque de survenue d'un accident cardiovasculaire.

Depuis 1964, on connait même une enzyme (HMG-CoA reductase) qui module la synthèse du cholestérol dans l'organisme. En bloquant son action, il devrait être possible de limiter le taux de mauvais cholestérol dans le sang. Reste à trouver la bonne molécule, efficace et sûre. Plus facile à dire qu’à faire.

Découvert en une semaine

Deux laboratoires sont en lice : le japonais Sankyo et l’américain Merck, où Alberts est entré en 59 comme technicien de laboratoire avant de gravir les échelons. La compétition s’annonce rude, d’autant que Sankyo est déjà parvenu à isoler un candidat : la mévastatine. En 78, Alberts et son assistante Julie Chen testent des champignons de culture issus d’un laboratoire madrilène. En seulement une semaine, ils viennent de découvrir la lovastatine…

En septembre 1980, branle-bas de combat au sein de l’équipe d’Alberts. Le concurrent japonais Sankyo vient d’interrompre ses essais chez le chien : d’après la rumeur, la mévastatine provoquerait des tumeurs intestinales. La direction de Merck interrompt immédiatement les essais cliniques de la lovastatine. Il faudra trois ans pour démontrer l’absence de toxicité, et reprendre les essais chez l’homme.

Un succès controversé

C’est en 87, sept ans plus tard, que la lovastatine reçoit son autorisation de mise sur le marché aux États-Unis, sous le nom de Mervacor. Entre-temps, le médicament a montré son efficacité en réduisant de plus d’un quart le taux de "mauvais" cholestérol. C’est la première d’une longue série de statines, qui permettront de prévenir le risque cardiovasculaire chez des millions de patients. Plus de 200 millions sont traités aujourd’hui dans le monde.

Ce succès n’est pas allé sans polémique. Utilisées parfois à tort et à travers depuis les années 90, dans le cadre d’un marché extrêmement juteux (des dizaines de milliards de dollars par an), les statines ont parfois vu leur intérêt violemment mis en doute. Aujourd’hui que la poussière est retombée et que les données s’accumulent, les experts s’accordent sur leur efficacité chez les patients à haut risque et dans la prévention de la récidive.

Depuis les années 80 où les chimistes régnaient en maîtres, le développement de petites molécules a marqué le pas au profit des biotechnologies, et les technologies de criblage à haut débit tendent à se substituer à l’intuition des chercheurs. "Trop d’ordinateurs, pas assez de cerveaux", grommelait Alberts, interrogé par Science en 2005. Lui restera en tout cas dans l’histoire comme un cerveau d’exception.

Source : Triumph of the Heart: The Story of Statins, de Jie Jack Li.

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