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Technique ANP

Grossesse : les maladies génétiques des enfants pourraient être soignées avant leur naissance

Par Charlotte Arce

Pour la première fois, des chercheurs ont utilisé avec succès la thérapie génique pour guérir une maladie génétique présente chez la souris, ouvrant ainsi la voie à la recherche sur le traitement des maladies génétiques chez les fœtus humains.

aywan88/iStock
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La recherche sur la thérapie génique n’en finit pas d’avancer. Alors que des chercheurs sont déjà parvenus à redonner la vue à des souris malvoyantes, ils seront peut-être bientôt capables de guérir les maladies génétiques des enfants avant même leur naissance.

C’est en tout cas l’espoir suscité par l’étude menée par des chercheurs des universités de Carnegie Mellon et de Yale qui ont utilisé pour la première la thérapie génique pour guérir une maladie génétique dans un modèle murin. Leurs travaux ont été publiés dans la revue Nature Communications

Chaque année, environ 8 millions d’enfants naissent avec des troubles génétiques graves ou des malformations congénitales. Détectées pendant la grossesse grâce à l’amniocentèse, ces conditions génétiques ne pouvaient jusqu’ici pas être corrigées avant la naissance. "Au début du développement embryonnaire, il y a de nombreuses cellules souches qui se divisent rapidement : si nous pouvons corriger une mutation génétique tôt, nous pourrions réduire considérablement l'impact de la mutation sur le développement du fœtus ou même guérir la maladie", explique Danith Ly, professeur de chimie au Mellon College of Science de Carnegie Mellon.

6% des mutations corrigées

Pour mener à bien leurs travaux, les chercheurs ont testé la thérapie génique sur des acides nucléiques peptidiques (ANP), des molécules synthétiques aux bases similaires à l’ADN, mais qui se différencient par leur squelette. Ces acides nucléiques peptidiques avaient déjà été utilisés auparavant pour soigner la bêta-thalassémie, un trouble génétique du sang entraînant une réduction de la production d’hémoglobine chez la souris adulte.

Leur technique utilise une nanoparticule pour livrer des molécules d'ANP jumelées à l'ADN du donneur au site d'une mutation génétique. Lorsque le complexe ADN-ANP identifie une mutation, la molécule d'APN se lie à l'ADN et "dézippe" ses deux brins. L'ADN du donneur se lie alors à l'ADN défectueux et stimule les voies de réparation de l'ADN de la cellule, ce qui lui permet de corriger l'erreur.

C’est sur des souris que les chercheurs ont mené leur expérience : ils ont injecté le complexe d’ANP dans le liquide amniotique de souris dont les fœtus portaient une mutation du gène de la bêta globine, responsable de la bêta-thalassémie – utilisant ainsi une technique semblable à celle de l’amniocentèse.

Avec une seule injection d’ANP pendant la gestation, les chercheurs ont pu corriger 6% des mutations : une grande avancé, puisque cette correction a provoqué des améliorations significatives des symptômes de la bêta-thalassémie chez la souris, notamment une augmentation des taux d’hémoglobine, un développement de la rate et une augmentation du taux de survie.

Contrairement à la technique d'édition du génome CRISPR-Cas9, qui peut endommager l’ADN, les chercheurs ont noté que cette technique ANP ne présentait pas d’effet hors-cible du traitement. "La technique ANP est idéale pour la thérapeutique, elle ne coupe pas l'ADN, elle se fixe sur elle et répare les choses qui semblent inhabituelles Nous avons regardé 50 millions d'échantillons et n'avons pas trouvé d'erreur hors-site", affirme le Pr Ly, qui compte poursuivre ses travaux. Il souhaite notamment savoir si utiliser ce traitement par thérapie génique plusieurs fois pendant la gestation lui permettra d’atteindre des taux de réussite encore plus élevé.