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Traitement préventif

Sida : entre 1600 et 4000 contaminations à cause de la mise sur le marché trop tardive du Truvada

Par Charlotte Arce

Selon un rapport de l’inspection générale des affaires sociales (IGAS), l’Agence nationale du médicament (ANSM) aurait trop tardé avant de mettre sur le marché le Truvada, un médicament anti-VIH préventif. 

MarcBruxelle/iStock
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L’Agence nationale de sécurité du médicament (ANSM) a-t-elle trop tardé avant d’octroyer au Truvada, un traitement anti-VIH en prophylaxie Pré-exposition (PrEP) à prendre avant un rapport sexuel à risque, son autorisation de mise sur le marché ?

C’est ce qu’avance un rapport de l’inspection générale des affaires sociales (IGAS) que s’est procuré Le Monde. Selon le service administratif, l’instruction "anormalement longue" du dossier par l’ANSM n’a pas été sans conséquence puisque durant les 35 mois qu’a duré le processus, entre 1 666 et 4 000 personnes auraient été contaminées par le VIH.

Une accumulation de retards

La longue histoire de mise sur le marché du Truvada a débuté en janvier 2013, lorsque l’association AIDES a saisi l’ANSM pour demander la mise à disposition du Truvada sur le marché. À cette époque, le médicament suscite encore de vives inquiétudes de la part de certaines associations anti-VIH, qui craignent que le médicament PrEP ne sape leur campagne de prévention axée sur l’utilisation du préservatif.

Dès les premiers mois, les retards se sont accumulés : Le Monde explique que le laboratoire Gilead, qui fabrique le Truvada, a mis quatre mois à fournir à l’ANSM les documents nécessaires à l’instruction du dossier. Entre octobre 2013 et juillet 2014 – soit 9 mois - "aucun acte de procédure discernable n’est intervenu" à l’ANSM, précise le rapport. AIDES finit par relancer l’ANSM en mai 2014 et reçoit une réponse de la ministre de la Santé Marisol Touraine le 7 juillet.

Est alors nommé deux semaines plus tard par l’Agence du médicament un comité scientifique afin de préparer la "recommandation temporaire d’utilisation" (RTU) par laquelle l’ANSM peut encadrer des prescriptions non conformes à l’autorisation de mise sur le marché (AMM), précise le quotidien.

En janvier 2015, près de deux ans après la saisine de l’ANSM par AIDES, le comité scientifique entame enfin ses travaux, qu’il rend à la fin de l’année. Le Truvada reçoit enfin sa recommandation temporaire d’utilisation, qui ne prend effet qu’en janvier 2016. Soit 35 mois après le début de l’instruction.

"Le retard accumulé dans l’instruction de la RTU du Truvada avait été relevé par la plupart des acteurs importants de l’époque : partenaires de l’administration de la santé publique au premier chef – responsables associatifs en particulier –, mais aussi parties prenantes, collaborateurs et même dirigeants de cette administration, souligne le rapport qui poursuit : plusieurs d’entre eux ont ainsi rapporté que le dossier RTU, pourtant important en termes de santé publique, leur avait paru être 'enlisé' ou 'enterré' pendant de trop longs mois", écrit l’IGAS dans son rapport.

Entre 1 600 et 4 000 contaminations qui auraient pu être évitées

Cette attente n’a pas été sans conséquence. Selon l’IGAS, qui se base sur les données de la direction générale de la santé, une mise sur le marché plus précoce du Truvada aurait potentiellement pu éviter de 1 666 à 4 000 contaminations par le VIH.

Interrogé lundi 9 juillet par France Inter, l’ancien président de l’association AIDES Bruno Spire, estime que "l’administration, et de nombreux membres du corps médical, ont une responsabilité dans le fait que des personnes ont été contaminées pendant cette période alors qu’elles auraient pu bénéficier d’un accès précoce".

À l’heure actuelle, environ 7 000 personnes en France utilisent le Truvada en traitement préventif contre le VIH. Son essai clinique fait état d'un risque de contamination réduit de 86%. La France est le premier pays à avoir autorisé sa mise sur le marché.