C’est ce qu’on appelle un coup de Jarnac. En pleine polémique sur l’homéopathie, la Haute autorité de santé (HAS), autorité indépendante en charge de l’évaluation des médicaments, s’est immiscée dans le débat. Sommée d’évaluer l’efficacité de quatre spécialités homéopathiques en vue de maintenir leur remboursement (une procédure automatique tous les cinq ans), l’autorité s’est fendue d’une pique inattendue.
"La Commission s’étonne du maintien du taux de remboursement à 30% des médicaments homéopathiques à nom commun compte tenu du taux de remboursement à 30% voire 15% de médicaments ayant fait la preuve de leur efficacité", a ainsi dénoncé la commission de la transparence de la HAS, dans ses avis du 13 juin 2018. Les membres de la commission se sont ensuite abstenus d'évaluer les spcialités concernées, comme la réglementation les y contraint.
Un régime d’exception
Alors que les médicaments conventionnels doivent prouver leur efficacité pour prétendre à un remboursement, les spécialités homéopathiques suivent un régime d’exception, instauré en 1984 par le ministre de la Santé Georgina Dufoix, acquise aux médecines non conventionnelles. L’homéopathie est depuis remboursée par l’assurance maladie (initialement à 65%, à 30% désormais) sans aucune évaluation sur son efficacité, la HAS devant se contenter de jouer les chambres d’enregistrement.
Par contraste, les médicaments conventionnels obtiennent un taux de remboursement indexé sur leur service médical rendu (SMR) : de 15% (SMR faible), 30% (SMR modéré), ou 65% (SMR important ou majeur). Les médicaments jugés indispensables sont quant à eux remboursés à 100%.
L'homéopathie sur la sellette
Une situation insolite, dénoncée en mars dernier par un groupe de 124 professionnels de santé dans une tribune du Figaro. Contrainte de se prononcer sur ce sujet brûlant, la ministre de la Santé Agnès Buzyn a accepté d’ouvrir le dossier, signant peut-être la fin du remboursement de l’homéopathie à court terme.
D’un point de vue scientifique, le débat sur l’efficacité propre de l’homéopathie est réglé depuis longtemps : en l’absence de toute substance active détectable, les spécialités homéopathiques n’ont aucune action propre. Les études cliniques sont convergentes, et l’académie de médecine comme les académies des sciences européennes ont depuis longtemps tranché la question.
Mais le débat politique et de santé publique est, quant à lui, loin d’être clos : sans effet secondaire et susceptible d’induire un effet placebo, l’homéopathie a-t-elle une place légitime dans la prise en charge ? Au risque de parfois prendre le pas sur les traitements conventionnels ? Quid, alors, du remboursement par l'assurance maladie ? Pour la HAS, la réponse semble trouvée.