A partir de 2019, le laboratoire Merck prévoit de lancer la nouvelle formule du Levothyrox dans 21 pays de l’Union européenne. "Plusieurs rapports officiels d’expertise publiés ces derniers jours permettent d’attester une nouvelle fois de la qualité de la nouvelle formule du Lévothyrox® et de conforter les 2,5 millions de patients français qui, depuis plus d’un an, ont trouvé leur équilibre thyroïdien grâce à elle. Cette confiance renouvelée dans la nouvelle formule du Lévothyrox® en France fait également écho à l’avis positif rendu au niveau européen, le 18 juillet, après une phase d’évaluation approfondie dans le cadre de la procédure réglementaire visant à permettre à 21 Etats-membres de commercialiser la nouvelle formule du Lévothyrox®", indique l’entreprise dans un communiqué.
L’Espagne, où de nombreux patients français insatisfaits de la nouvelle formule avaient pris l’habitude de s’approvisionner, est aussi concernée. De fait, le médicament thyroïdien ne sera plus disponible nulle part en Europe, puisque les 7 pays non concernés par la mesure, comme l’Italie, commercialisent des compositions légèrement différentes. Le Conseil d’État a par ailleurs rejeté la demande de patients français qui réclamaient en urgence des mesures pour assurer la disponibilité de l’ancienne formule. Aujourd’hui, quatre concurrents au Levothyrox nouvelle formule sont disponibles: L-thyroxin Henning, Thyrofix, L-thyroxine SERB et TCAPS.
Effets secondaires indésirables
L’affaire du Levotyrox a commencé en février 2017, lorsque la formule du médicament a été changée. Cette modification a consisté à remplacer le lactose, qui enrobait l'hormone thyroïdienne, la lévothyroxine, pour en faire un comprimé, par du mannitol. Cette modification avait été demandée par l’Agence de médicament (ANSM) afin de garantir la stabilité du produit dans le temps, ce qui n'était pas le cas avec l’ancienne formule.
Problème : les malades ont ressenti des effets secondaires indésirables (fatigue, maux de tête, insomnie, vertiges, douleurs articulaires et musculaires et chute de cheveux). Sur les 2,3 millions de malades traités en France, 17 000 cas d’effets secondaires ont été recensés. Au total, 5062 effets indésirables ont été classés comme graves et 14 décès ont été comptabilisés par l'ANSM, sans qu’un lien direct avec la nouvelle formule puisse être formellement établi. Selon le ministère de la Santé, 500 000 personnes auraient abandonné la nouvelle formule du médicament.
Deux changements notoires
Dans un communiqué daté du 14 juin dernier, l’Association française des malades de la thyroide (AFMT) avait déclaré avoir commandé à un laboratoire étranger une nouvelle analyse de la formule controversée du médicament. Selon elle, des premiers résultats mettent en lumière deux changements notoires par rapport à la précédente formule. D’abord, celle-ci contiendrait moins de lévothyroxine que les spécifications en vigueur. La moindre présence de cette hormone thyroïdienne de synthèse serait à l’origine des dysfonctionnements du traitement constatés chez les patients. "Des patients cancéreux se trouvent sous-dosés en hormones thyroïdiennes, nous avons observé de façon conséquente des réveils de cancers endormis depuis des années", affirme l'association.
De plus et toujours selon cette structure, son analyse montre la présence dans le médicament de dextrothyroxine alors qu'elle ne figure pas dans la liste des composants. Non-commercialisée en France, cette substance de synthèse a été interdite aux États-Unis car elle est soupçonnée d’occasionner les mêmes effets secondaires que ceux dont se plaignent actuellement les malades de la thyroïde utilisant la nouvelle formule du Levothyrox.
1 200 patients mécontents ont déjà porté plainte
L’AMFT a fait savoir que les résultats de l’étude de la nouvelle formule du Levothyrox ont été transmis à une juge d’instruction du pôle santé de Marseille chargée du dossier, ouvert pour "tromperie aggravée, blessures involontaires et mise en danger d’autrui". Chantal L'Hoir, présidente de l'Association française des malades de la thyroïde, en appelle à la démission de la ministre de la Santé Agnès Buzyn, ainsi qu'à la reconnaissance "en urgence" de crise sanitaire "et, par principe de précaution, au retrait du Levothyrox". Environ 1 200 patients mécontents ont déjà porté plainte contre Merck.
Trois rapports de l’Agence du médicament (ANSM) indiquent de leur côté que les effets indésirables de la nouvelle formule sont identiques à ceux déjà connus avec l’ancienne formule. L’agence signale aussi qu’il y en a beaucoup plus, sans pouvoir expliquer pourquoi.