La dépendance aux antalgiques d'opioïdes est un vrai problème de santé publique aux Etats-Unis : environ 64000 personnes seraient mortes d'une overdose de médicaments prescrits par leur médecin en 2016. Extraits du pavot comme la morphine ou encore la codéine, ces substances sont parfois nécessaires pour soulager une douleur intense (en cas de cancer par exemple), mais peuvent également créer des addictions très fortes chez certaines personnes.
Les accros aux opioïdes se fournissent chez leur vétérinaire
Des vétérinaires du Colorado, aux Etats-Unis, sont préoccupés par le fait que certains patients sont devenus tellement accros qu'ils en arrivent à blesser intentionnellement leurs animaux de compagnie dans le but d'obtenir une ordonnance du vétérinaire et de s'en procurer. C'est ce que révèle une enquête menée par l'École de santé publique du Colorado et une association vétérinaire locale, auprès de 189 vétérinaires.
Selon leurs résultats publiés dans l'American Journal of Public Health, 13% d'entre eux ont déclaré qu’un de leurs clients avait déjà, soit blessé, soit rendu un animal malade de manière intentionnelle pour obtenir une ordonnance. Près de 45% ont affirmé connaître un membre de leur personnel souffrant d'une dépendance aux opioïdes et 12% étaient même au courant que des membres de leur personnel volaient des opioïdes, ou en abusaient.
"Le rôle des vétérinaires dans la réduction de l'abus d'opioïdes n'a pas fait l'objet d'un examen approfondi", a déclaré Lili Tenney, principale auteure de cette étude et directrice adjointe du Centre pour la santé, le travail et l'environnement de l'Ecole de santé publique du Colorado. "Nos résultats indiquent que nous devrions accorder plus d'attention à la façon dont les consommateurs d'opioïdes se procurent leurs médicaments - y compris par le biais des cliniques vétérinaires". Si les vétérinaires peuvent stocker et prescrire divers opioïdes dans leurs cliniques, il semble que le médicament le plus couramment ciblé soit le tramadol, un analgésique utilisé pour traiter à la fois les humains et les animaux.
Des prescriptions en veux-tu en voilà
En 2013, déjà, une enquête du Washington Post relayée en France par le Nouvel Obs, révélait que ces médicaments étaient trop souvent prescrits aux patients pour des maladies chroniques peu intenses. L’enquête pointait du doigt les lobbies pharmaceutiques accusés de minimiser les effets addictifs et dangereux de ces médicaments sur le long terme.
Pour Yasmin Hurd, directrice de l’Institut des addictions de l’hôpital Mount Sinai à New York : "L’éducation des médecins et du grand public est un élément clé". En effet, les médecins américains doivent réaliser les risques qu’engendre une trop grande prescription des ces médicaments. Selon BFM TV, de simples patients victimes de maux de dos devenaient dépendants et devaient se désintoxiquer à cause de ces anti-douleurs.
Selon une étude révélée en novembre 2017 par l’OFMA (l’Observatoire Français des Médicaments Antalgiques) : "En France, les hospitalisations pour overdose d’opioïdes ont augmenté de 128% de 2000 à 2015, et les décès liés à une overdose d’opioïdes prescrits ont significativement augmenté de 161%, entre 2000 et 2014". En juillet dernier la ministre de la Santé, Agnès Buzyn, faisait retirer de la vente libre en pharmacie plusieurs médicaments à base de codéine et d’autres dérivés de l’opium, après la mort d’adolescents. Grâce aux ordonnances très encadrées, la mort par opioïde reste tout de même bien mieux contrôlée en France qu’aux États-Unis.