Dans quelques jours, le Pr Bertrand Dautzenberg devrait rendre son rapport sur l'e-cigarette à la ministre de la Santé Marisol Touraine. A l'heure où la cigarette électronique semble faire de plus en plus d'adeptes, ils seraient plus de 500 000 en France, les réponses du pneumologue sont très attendues. S'agit-il ou non d'un produit nocif, doit-il être classé dans les dispositifs médicaux, peut-on le considérer comme un substitut nicotinique ?
Aujourd'hui, l'absence de classement de la cigarette électronique a permis à de nombreux magasins d'en faire le commerce alors que les pharmacies ne peuvent pas en délivrer. De même, les consommateurs en font usage dans les lieux publics ou au bureau sans savoir si la loi les y autorise ou s'ils exposent leurs collègues au tabagisme passif.
Sur ce point, l’Institut national de recherche et de sécurité (INRS) vient de prendre position dans son dernier numéro. « L'employeur peut utiliser la voie du règlement intérieur pour interdire la consommation de cigarette électronique sur le lieu de travail », stipule cet organisme officiel de prévention reconnu par les employeurs et les salariés. L'INRS se base principalement sur le code du travail et avance plusieurs arguments.
L'Institut rappelle que le propylène-glycol, présent dans la cigarette électronique, est responsable lorsqu'il est inhalé d’une irritation oculaire et de difficultés respiratoires. Un point de vue partagé par la Direction générale de la santé qui indique que ce solvant peut également « entraîner des effets neurologiques comparables à l’état d’ébriété tandis que les dérivés terpéniques pourraient avoir une incidence chez les consommateurs présentant des antécédents d’épilepsie... »
L'INRS s'est en outre intéressé à l'impact de la cigarette électronique sur la qualité de l'air intérieur en reprenant les conclusions d'une étude (2). « Les auteurs, souligne l'INRS, concluent que l'usage de la cigarette électronique produit des composés organiques volatils et des particules fines ou ultrafines dans l'environnement. » Bien réel, ce risque serait moins important qu'avec la cigarette classique. « Au vu de la pollution de l'atmosphère engendrée par ces dispostifs, indique l'INRS, il ne peut être conclu, à l'heure actuelle, à l'absence de risque pour l'entourage du consommateur. »
Enfin, le code du travail impose à l’employeur une obligation générale quant à la santé et la sécurité des salariés. Tenant compte de son « obligation de résultat », l'employeur, précise l'Institut de prévention, « se doit de protéger tous les salariés d'une éventuelle exposition "passive" à ce produit (la cigarette électronique) qui, en raison des impuretés qu'il contient et des composés volatils et des particiules libérés dans l'atmosphère, est susceptible d'être préjudiciable pour la santé. »
L'employeur, conclut l'INRS, « peut utiliser la voie du règlement intérieur pour interdire la cigarette électronique sur le lieu de travail et plus largement dans tous les lieux fermés et couverts qui accueillent du public. »
(1) Numéro 133 de « Références en santé au travail »
(2) Schripp T, Markewitz D, Uhde E Salthammer T Does e-cigarette consumption cause passive vaping ? Indoor Air.12013; 23