En cette journée internationale de prévention des overdoses, il serait logique de parler drogues. Pourtant, on abordera ici un problème médicamenteux : les opioïdes.
Ces traitements, de plus en plus prescrits contre la douleur en France, sont devenus un véritable problème de santé publique. "Aujourd’hui, il y a plus d’overdoses chez les patients avec des douleurs chroniques que chez les consommateurs de drogue", s’alarme dans Le Parisien Nicolas Authier, président de l’Observatoire français des médicaments antalgiques. N’importe qui peut sombrer. "Ce n’est pas une problématique spécifique des usagers de drogue. On parle ici de femmes (60 %) et d’hommes de 40, 50, 60 ans, sans antécédents de prise de drogue. Confrontés à la douleur chronique, avec pour certains des comorbidités psychiatriques, pour d’autres des problèmes familiaux ou au boulot, ils se retrouvent entraînés dans la spirale irréversible de l’addiction", ajoute le spécialiste.
500 000 prescriptions supplémentaires
Chaque année, 12 millions de Français sont traités par des médicaments à base d’opium, dont 1 million par opioïde fort. Entre 2004 et 2007, les prescriptions supplémentaires d’opioïdes forts, comme le l’Oxycodone et le Fentanyl, ont augmenté de 100% (500 000 prescriptions supplémentaires). En conséquence, les hospitalisations pour overdose et le nombre de décès associés ont explosés depuis les années 2000 (+167% et +146%).
Un problème venu tout droit des Etats-Unis, où 64 000 Américains sont morts en 2017 par overdose d’opiacés, ce qui en fait l'une des causes principales de la diminution de l’espérance de vie depuis quelques années. Conscients des enjeux, les médecins et les décideurs américains appellent d’ailleurs à diminuer ces prescriptions, très en vogue depuis les années 90. "Il n’est pas question de les interdire mais de mieux maîtriser leur usage. Pour être bonne, une prescription doit être limitée dans le temps, faire l’objet d’une réévaluation systématique et d’une vigilance accrue pour les patients à risque", précise Nicolas Authier. "Les opioïdes forts étaient initialement délivrés pour soulager les douleurs du cancer. Les indications de prescription se sont étendues à d’autres douleurs chroniques, du dos, des articulations… avec probablement dans ces cas-là une promotion pharmaceutique. Résultat : 88 % des prescriptions sont actuellement faites pour des douleurs non-cancéreuses", rappelle-t-il.
Un nouvel antalgique morphinomimétique sans effets addictifs
Concernant les douleurs chroniques, les chercheurs de l'Université de l'État de Washington (Etats-Unis) ont d’ailleurs récemment découvert que l'arrêt du traitement aux opioïdes à long terme ne les aggrave pas. Il vaut donc mieux, dans ce cas précis, stopper purement et simplement cette médication. La mise au point d'un nouvel antalgique morphinomimétique sans effets addictifs est aussi en cours.