Va-t-on un jour pouvoir prédire le risque de développer certains troubles et maladies avant même que les premiers symptômes n’aient fait leur apparition ? C’est la prouesse qu’affirment pouvoir bientôt réaliser des chercheurs de l’Université de Copenhague, au Danemark.
Dans une nouvelle étude publiée dans le Canadian Medical Association Journal (CMAJ), l’équipe de chercheurs affirme être en mesure de prédire sur dix ans l’apparition de la démence, une maladie neurodégénérative liée à l’âge et qui affecte les fonctions cérébrales, en particulier la mémoire, l’attention et le langage. La maladie d’Alzheimer, qui touche près de 900 000 personnes en France, est la forme la plus courante de démence liée à l’âge. C’est aussi, pour l’heure, une maladie incurable.
Une étude à large cohorte
Pour parvenir à mettre au point l’algorithme, les chercheurs danois ont d’abord identifié que l’âge, mais aussi le sexe, aidaient à déterminer le risque de développer une démence sur 10 ans. Ils ont aussi pris en compte les variations communes du gène APOE. Celles-ci sont considérées comme un facteur de risque génétique important de la maladie d’Alzheimer puisque le dysfonctionnement du gène entraîne l’accumulation des plaques amyloïdes au sein du tissu cérébral.
Après avoir identifié ces facteurs de risque, les scientifiques les ont confrontés aux données portant sur 104 537 personnes résidant à Copenhague. Pendant plusieurs décennies, ces participants se sont pliés à des tests afin de mesurer leur risque de développer une démence : d’abord entre 1976 et 1978, puis au début des années 1980, des années 1990 et enfin dans les années 2000.
Les chercheurs ont aussi interrogé les volontaires sur leur mode de vie, ont procédé à des examens physiques et ont prélevé des échantillons de sang. Les participants à l’étude ont ensuite été répartis en trois groupes d’âge.
Un tiers des cas de démence sont évitables
Pour le Dr Ruth Frikke-Schmidt, professeure au département de biochimie clinique de l’Université de Copenhague, les résultats mis en lumière prouvent qu’au moins "un tiers des cas de démence pourraient être évités".
D’après les résultats, le risque de développer une démence chez les femmes ayant la soixantaine était de 7% contre 6% pour les hommes. Dans la décennie qui a suivi leur 70e anniversaire, leur risque est passé à 16% et 12% respectivement, pour atteindre 24% et 19% chez les personnes âgées de 80 ans et plus.
"Les estimations du risque absolu de démence par âge, sexe et variation commune du gène APOE sur 10 ans pourraient permettre d'identifier des personnes à haut risque pour des interventions préventives ciblées précoces", affirment les auteurs, qui aimeraient que leurs travaux servent à mieux prévenir le risque de développer une démence en ciblant particulièrement les personnes à risque.
"Selon la Commission Lancet, une intervention précoce en cas d’hypertension, de tabagisme, de diabète, d’obésité, de dépression et de perte d’audition peut ralentir ou prévenir le développement de la maladie. Si les personnes les plus à risque peuvent être identifiées, une prévention ciblée avec une réduction des facteurs de risque peut être initiée tôt avant que la maladie ne se développe, retardant ainsi l'apparition de la démence ou la prévenant", estime le Dr Frikke-Schmidt.
Son étude n’est toutefois pas exempte de limites puisqu’elle était uniquement centrée sur des participants blancs européens d'une zone géographique relativement restreinte. Des recherches supplémentaires sont donc nécessaires pour établir un lien entre les résultats et une population plus large.