Son corps, ravagé par la maladie, ne pouvait laisser indifférent. Vendredi 7 septembre, Fabian Tomasi, symbole de la lutte contre le glyphosate en Argentine, est mort à l'âge de 53 ans des suites d'une polyneuropathie toxique sévère (un processus homogène d’atteintes multiples de nerfs périphériques, dont les distaux en particulier).
"Ils ont fini de l'assassiner. Fabian était malade depuis plus de dix ans. Il s'empêchait de mourir pour pouvoir dénoncer la pratique agricole génocidaire qui l'a détruit, a réagi Medardo Avila, membre du Réseau des médecins des villages fumigés. Sa mort nous rend très tristes et nous met très en colère. Nous avons un système de production qui contamine la moitié du pays."
"Cancérigène probable"
Pendant des années, cet ouvrier agricole a manipulé du glyphosate sans aucune protection, alors que cette substance est classée comme "cancérigène probable" par l'Organisation mondiale de la santé (OMS). Il remplissait d'herbicides les réservoirs d'avions de fumigation, sans que personne ne lui dise qu’il mettait sa santé en danger.
Révolté, ce père de famille a consacré les dernières années de sa vie à alerter sur les dangers des herbicides, participant à de nombreux reportages et laissant photographier son corps meurtri pour les besoins de la lutte. "Le glyphosate est terriblement trompeur, un piège qui nous a été tendu par des gens très puissants. Il ne restera personne. Toutes les terres que nous avons ne suffiront pas pour enterrer tous les morts", avait-il dit à l’AFP.
Un problème planétaire
La maladie l'empêchait de consommer des aliments solides. Toute sa masse musculaire avait fondu, et la mobilité de ses mains était limitée. Incapable de vivre seul, c'est sa mère de 80 ans qui s'est occupé de lui jusqu’à sa mort.
Le glyphosate est un problème planétaire. Selon le Journal of the American Medical Association, la présence de ce pesticide dans l’organisme des habitants de Californie du Sud a par exemple nettement augmenté ces dernières années. Les chercheurs ont analysé les urines de 100 personnes âgées de plus de 50 ans, entre 1993 et 2016.
Dans ce groupe, les taux détectables de glyphosate ont grimpé en moyenne de 0,20 microgramme par litre au cours de la période 1993-1996 à 0,44 entre 2014 à 2016. La limite fixée par l’Agence américaine de protection de l’environnement est de 1,75 milligramme par kilo. Celle de l’Union européenne de 0,3 mg par kilo.