Un pas de plus contre le tabagisme. Une nouvelle étude de l’Inserm vient de démontrer qu’il est possible de manipuler l'addiction à la nicotine chez la souris, et ce de manière rapide et réversible.
"Cette technologie novatrice permet de mieux comprendre le rôle des différents récepteurs nicotiniques et des différentes voies neuronales dans la mise en place, le maintien de l’addiction à la nicotine, mais aussi dans les processus de manque et de rechute. Cette étape est particulièrement importante pour l’identification de nouvelles cibles thérapeutiques adéquates pour lutter contre l’addiction à la nicotine", précise Alexandre Mourot, responsable de la recherche.
La lumière violette permet de stopper l’attirance pour la nicotine
La nicotine, principal agent addictif du tabac, agit sur le cerveau en se liant sur les récepteurs nicotiniques. Partant de ce postulat, les scientifiques ont modifié le récepteur nicotinique chez la souris, afin de pouvoir y accrocher un nano-interrupteur chimique réagissant à la lumière. Sous l’effet de la lumière violette, l’interrupteur se replie en empêchant la nicotine de se fixer : le récepteur est "off". Sous l’effet de la lumière verte, ou dans l’obscurité, l’interrupteur est déplié et va ainsi laisser la nicotine agir : le récepteur est "on".
Concrètement, la lumière violette permet de stopper l’attirance pour la nicotine. L’équipe a comparé le temps que passaient des souris dans deux compartiments, avec ou sans nicotine. Sous lumière verte, lorsque la nicotine peut exercer son effet, ils ont observé que les animaux préféraient le compartiment avec nicotine. Sous lumière violette par contre, les souris passaient autant de temps dans chaque compartiment, prouvant qu’elles n’étaient alors plus attirées par la nicotine.
Un récepteur nicotinique particulier
Pour cette étude, les chercheurs se sont focalisés sur un récepteur nicotinique particulier, le type b2, et sur une zone clé du circuit de la récompense, délivrant la dopamine. Lors d’une injection intraveineuse de nicotine, les neurones à dopamine répondent par une augmentation de leur activité électrique. La libération de dopamine qui en découle est la clé de la mise en place de l’addiction.
La nicotine est un composé chimique naturellement présent dans les plants de tabac, qui fait partie des alcaloïdes. Ses propriétés pour la plante sont d'éloigner les parasites (fongicide, acaricide, insecticide). Chez l'homme, la nicotine engendre la dépendance au tabac ainsi que les sensations de détente, de plaisir, de diminution de l'anxiété et de la dépression.
Lorsque l’on fume, il existe un "pic" initial pendant lequel la concentration de nicotine dans le corps augmente en continu, jusqu’à la combustion totale de la cigarette, soit entre 5 et 7 minutes. Ensuite, cette concentration diminue rapidement : après une heure, elle diminue de moitié ; après deux heures, il ne reste dans le sang plus qu’un quart du pic initial.
Les dégâts sur les jeunes générations
Il restera cependant encore quelques traces de nicotine dans l’organisme. Au bout de 4 jours, le sang aura purgé la totalité de la nicotine qu’il contenait. Les autres dérivés de la nicotine et du tabac, qui sont responsables de l’envie de fumer (cotinine, anabasine et la nornicotines) sont beaucoup plus longs à éliminer dans certains organes du corps, comme les reins ou les tissus adipeux. Il faut en moyenne trois semaines pour être totalement vierge de traces de nicotine, l’évacuation du produit se faisant principalement via l’urine.
Les dégâts sur les jeunes générations peuvent ainsi être considérables. Selon une toute récente étude, les artères des adolescents qui fument commencent à se raidir dès l'âge de 17 ans. La rigidité artérielle indique que les vaisseaux sanguins commencent à être endommagés, ce qui fait le lit de futurs problèmes cardiaques et vasculaires. On parle de crises cardiaques ou d’accidents vasculaires cérébraux.
"En France, plus de 13 millions de personnes fument", déclarait en mars dernier le gouvernement, rappellant que le tabac est une "source majeure de cancers, de maladies cardio-vasculaires et d’insuffisances respiratoires, responsables de 73 000 décès chaque année". Chaque jour dans le monde, 11 millions de cigarettes sont vendues, générant ainsi 39 milliards de bénéfices, soit l'équivalent du PIB du Luxembourg.