C'est une première dans le Nord-Pas-de-Calais. Gérard Courtois, 88 ans, est le premier patient à subir une intervention chirurgicale de remplacement d'une valve cardiaque sans aucune anesthésie générale.
Le patient d'abord réticent
L'opération du cœur qu'il a subi consistait à remplacer une valve aortique en remontant la valve à implanter par voie artérielle Une simple anesthésie locale a été pratiquée pour pratiquer l'ouverture de l'artère fémorale afin d'introduire la valve montée dans le cœur via un cathéter.
Le problème est que l'utilisation de morphine ou d'anxiolytiques sur un patient âgé peut représenter un risque. Il fallait donc trouver une alternative pour ne pas mettre sa vie en danger durant l'opération. "Quelquefois, ces patients sont plus sensibles aux effets secondaires des médicaments qu'on injecte (morphine, anxiolytique, relaxants), ces produits peuvent entraîner une confusion neurologique. Avec l'hypnose, le patient récupère immédiatement", explique Arnaud Sudre, chef du service chirurgie interventionnelle au CHU de Lille.
Lorsque les médecins ont présenté l'alternative de l'hypnose à Gérard, ce dernier s'est d'abord montré réticent. Finalement, il a fini par accepter et c'est Hélène Sergent, infirmière du service de chirurgie interventionnelle spécialement formée, qui s'est chargée de l'hypnotiser.
Une fois arrivé sur la table d'opération, le patient n'a cessé de discuter avec son hypnotiseuse. Ils ont échangé sur sa passion pour le jardinage ou encore sur ses voyages en Thaïlande, Égypte ou Tunisie. Il était tellement détendu qu'il a fini par s'endormir. Après le succès de cette opération, l'expérience de l'hypnose sera renouvelée la semaine prochaine. Quatre nouvelles infirmières vont être formées à l'hypnose. En tout, on estime que 80% des patients peuvent être réceptifs à l'hypnose.
Un confort pour 99% des patients
De nombreuses études cliniques ont déjà démontré l’intérêt de l’hypnose pour soulager les douleurs et l’anxiété liées au cancer et à ses traitements. Depuis trois ans, le Dr Marcou, médecin anesthésiste réanimateur et hypnothérapeute à l’Institut Curie, à Paris, se sert régulièrement de cette technique lors d’opérations du cancer du sein, y compris pour des mastectomies partielles et totales, ainsi qu’en chirurgie ORL. Limitant le besoin en médicaments, l’hypnose aurait comme avantage de réduire les effets indésirables de l’anesthésie générale et permettrait une meilleure récupération post-opératoire. "En minimisant les effets de l'anesthésie sur les fonctions vitales tout en préservant le bien-être des patients, elle contribue au développement durable de l'anesthésie", affirme la médecin anesthésiste.
L'équipe du Dr Marcou a réalisé une étude rétrospective sur 150 patients ayant eu un cancer traité à l’Institut Curie entre 2011 et 2017 et dont les opérations ont été réalisées sous hypnosédation. La durée moyenne des interventions était de 60 minutes et la durée moyenne du séjour en salle de réveil était de 35 minutes. Les patients étaient âgés de 18 à 100 ans avec une moyenne de 60,5 ans, 22% avaient plus de 75 ans. Dans 99% des cas, l'hypnose a été accueillie de manière confortable pour le patient comme pour le chirurgien. L'inconfort du patient s'est produit dans seulement deux cas, et dans ces deux cas, l'anesthésie générale a été rapidement et facilement mise en œuvre.