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Fast food, sucreries, aliments transformés...

Inflammation et santé mentale: la malbouffe favoriserait la dépression

Par Charlotte Arce

Les aliments que nous mangeons auraient une incidence sur notre santé mentale selon une nouvelle étude. C’est particulièrement le cas de la "malbouffe" qui, en causant une inflammation de notre intestin, puis une inflammation générale de l'organisme et du cerveau, augmenterait le risque de dépression.

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Une alimentation trop grasse, trop sucrée et trop salée n’est pas seulement mauvaise pour notre santé physique : elle a aussi un impact négatif sur notre bien-être psychologique. C’est la conclusion d’une nouvelle étude menée par des chercheurs de la University College of London, en Angleterre. Publiée dans la revue Molecular Psychiatry, elle passe au crible les conséquences sur notre santé mentale des aliments que l’on met dans notre assiette.

Ses résultats sont sans appel : alors que les personnes privilégiant une alimentation saine comme, par exemple, le régime méditerranéen traditionnel, sont peu exposées au risque de dépression, celles qui ont tendance à manger peu équilibré sont au contraire plus exposées aux problèmes de santé mentale.

La malbouffe, responsable d’une inflammation systémique

Pour parvenir à cette conclusion, l’équipe de chercheurs anglais, espagnols et australien a analysé 41 études antérieures sur les liens entre l'alimentation et la dépression. Parmi elles, 5 études longitudinales menées auprès de 32 908 adultes britanniques, français, espagnols, australiens et américains ont particulièrement retenu son attention, car elles tiraient toutes sensiblement les mêmes conclusions sur les conséquences d’une mauvaise alimentation sur la santé mentale.

Selon le Dr Camille Lassale, auteur principale de l’étude, une alimentation trop riche et transformée est susceptible de causer une "inflammation systémique, ce qui peut augmenter le risque de dépression". L’analyse des différentes données a en effet montré que les aliments contenant beaucoup de matières grasses ou de sucre, ou qui étaient ultra-transformés, entraînaient une inflammation non seulement de l’intestin, mais de tout le corps, appelée "inflammation systémique".

C’est cette inflammation qui favorise le risque de dépression. "L'inflammation systémique peut affecter la santé mentale en transportant des molécules pro-inflammatoires dans le cerveau. Elle peut également affecter les molécules – les neurotransmetteurs - responsables de la régulation de l'humeur", détaille le Dr Lassale.

"La chimie de l’intestin est très similaire à la chimie du cerveau. Il n’est donc pas surprenant que des choses qui influencent l’intestin puissent également influencer le cerveau", explique au Guardian le Dr Cosmo Hallstrom, membre du Royal College of Psychiatry.

Le rôle-clé des bactéries intestinales

Selon les chercheurs, les nouveaux résultats mis en lumière prouvent qu’une mauvaise alimentation n’est pas seulement associée à la dépression : elle peut aussi la causer. De fait, changer de régime alimentaire en privilégiant les fruits, les légumes, les légumineuses et les céréales peut influer sur le bien-être mental.

"Il existe également des preuves émergentes qui montrent que la relation entre l'intestin et le cerveau joue un rôle clé dans la santé mentale et que cet axe est modulé par les bactéries gastro-intestinales, qui peuvent être modifiées par notre alimentation." Bactéries qui sécrètes des molécules qui passent dans la circulation sanguine et peuvent atteindre le cerveau.

Le niveau de preuve est encore insuffisant

Toutefois, ce point reste encore sujet à controverse. Selon le Dr Naveed Sattar, professeur de médecine métabolique à l’Université de Glasgow, "les preuves actuelles ne sont pas suffisantes pour prouver que les régimes alimentaires riches en végétaux peuvent prévenir la dépression, car la plupart des preuves démontrent jusqu'à présent que les personnes souffrant de problèmes de santé mentale empirent leur alimentation. Le lien avec l'inflammation en tant que mécanisme plausible pour expliquer un lien entre l'alimentation et la santé mentale est encore très ténu." Il reconnaît toutefois qu’un changement d’alimentation et de mode de vie dans la gestion des maladies chroniques est nécessaire et devrait systématiquement être prescrit par les professionnels de santé.

Il espère aussi que le lien entre alimentation et santé mentale sera davantage étudié à l’avenir. "La seule façon de prouver que les liens sont authentiques est de mener des essais randomisés de grande envergure sur des personnes sujettes à la dépression. De tels essais demanderaient un effort considérable, mais ils sembleraient intéressants à mener. Jusqu'à présent, seuls de petits essais ont été menés", a-t-il déclaré dans The Independent.