Aux Etats-Unis, une épidémie d’hémorragies dans des hôpitaux de l'Illinois a attiré l’attention des scientifiques. "En mars et avril 2018, plus de 150 patients se sont présentés dans des hôpitaux de l'Illinois avec coagulopathie et diathèse hémorragique", décrivent-ils dans The New England Journal of Medecine.
Intrigués, ils ont examiné les données médicales de patients admis au Saint Francis Medical Center de Peoria entre le 28 mars et le 21 avril 2018. Au total, 34 patients ont été identifiés comme ayant une coagulopathie synthétique associée aux cannabinoïdes, aussi connus sous le nom de cannabis de synthèse.
Indétectable via les tests de dépistage
De plus en plus consommé, le cannabis de synthèse est réputé pour produire les mêmes effets que le vrai, mais est très facile à trouver sur internet et indétectable via les tests de dépistage, car exempt de THC. Contrairement au cannabis qui est issu d’une plante, le cannabis de synthèse est une substance chimique, produite à partir de molécules. Le cannabis de synthèse se présente le plus souvent sous forme d’un mélange de plantes séchées (conditionné dans un petit sachet métallique) sur lesquelles une solution de cannabinoïdes de synthèse a été pulvérisée. Il peut également être vendu sous forme d’encens, de poudre ou d’e-liquide pour cigarette électronique. Ils portent toujours la mention "Not for human consumption" (non destiné à la consommation humaine).
L'empoisonnement à la superwarfarine a été confirmé chez les 15 patients testés. Les tests anticoagulants ont révélé la présence d’anticoagulants chimiques tels que le brodifacoum chez 15 patients (100%), de difénacoum chez 5 (33%), de bromadiolone chez 2 (13%) et de warfarine chez 1 (7%).
La vitamine K1 en guise de traitement
Les symptômes les plus fréquents des patients hospitalisés étaient une hématurie* marquée (56% de la cohorte) et des douleurs abdominales (47% de la cohorte). Une tomodensitométrie a été effectuée pour évaluer les douleurs abdominales et a révélé des anomalies rénales chez 12 patients.
En guise de traitement, la vitamine K1 (phytonadione) a été administrée par voie orale chez les 34 patients et par voie intraveineuse chez 23 (68 %). Une transfusion de globules rouges a été effectuée chez 5 patients (15 %) et une perfusion de plasma frais congelé chez 19 patients (56 %). Un patient est décédé des complications d'une hémorragie intracrânienne spontanée.
"Nos données indiquent que les adultérants superwarfarin des cannabinoïdes synthétiques peuvent entraîner une coagulopathie cliniquement significative. Dans la plupart des cas où le patient présentait une diathèse hémorragique, les symptômes ont été contrôlés à l'aide d'une thérapie de remplacement de la vitamine K1. Les composés cannabinoïdes synthétiques spécifiques ne sont pas connus", concluent les chercheurs.
*Présence de globules rouges dans les urines.