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Le co-dodo en cause

Mort subite du nourrisson : 150 décès évitables par an

Par Mathias Germain

Le risque de mort subite du nourrisson est multiplié par cinq pour les nourrissons de moins de trois mois qui dorment dans le lit de leurs parents, selon une étude britannique.

PETILLOT/SIPA
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Dormir avec son nourrisson dans le même lit parce que c’est plus simple la nuit pour l’allaiter ? Une mauvaise idée… Cela multiplie par 5 le risque de mort subite du nourrisson ! Et il s’agit d’un risque tout à fait indépendant d’autres facteurs, comme la présence d’une couverture, ou le tabagisme des parents.
Cette estimation du risque a été établie par une équipe de chercheurs britanniques de London School of Hygiene and Tropical Medicine. Elle a étudié à la loupe 19 études sur la mort subite du nourrisson, soit 1472 cas. Résultat : 22 % des décès recensés sont survenus dans des familles où l’on pratiquait le “co-dodo” ou “cosleeping”.
L’équipe a aussi estimé que 88 % de ces morts inattendues du nourrisson n'auraient "probablement” pas eu lieu si les enfants avaient été couchés dans leur berceau.

« Ce risque était déjà connu des spécialistes mais pour la première fois, elle le quantifie de façon précise et indépendante, souligne le Dr Inge Harrewijn, pédiatre au centre de référence sur la mort inattendue du nourrisson de Montpellier. Cela nous donne un argument supplémentaire pour convaincre les jeunes mamans, ou les jeunes parents, qui veulent dormir avec leur nourrisson, soit par commodité ou pour calmer d’éventuelles angoisses. »
En France, chaque année, environ 250 bébés sont touchés, d’après l’étude de l’Institut de veille sanitaire de 2009. 90 % des décès interviennent avant les six mois de l’enfant et les 2 à 4 mois sont les plus exposés. « Nous estimons qu’il est encore possible de faire baisser le nombre de décès, renchérit le Dr Harrewijn. En 1994, une campagne nationale d’information avait permis de le faire chuter de 75 % ! Depuis, il n’y a pas eu de communication, or nous constatons qu’un problème de couchage est mentionné dans 46 % des décès. »
 

Ecouter le Dr Inge Harrewijn, pédiatre au centre de référence sur la mort inattendue du nourrisson au CHRU de Montpellier. «  On estime que 100 à 150 décès pourraient être évités ».
 


Si mettre son bébé dans son lit est facteur de risque aggravant, à l’inverse dormir dans la même pièce est un facteur protecteur. « Nous le conseillons environs jusqu'à 6 mois, explique le Dr Inge Harrewijn. Après, c’est moins profitable pour l’enfant et pour les parents. »
La mode des berceaux collés au lit est-elle une bonne solution ? « Pourquoi pas, il faut simplement respecter quelques règles de couchage simples ».  A savoir coucher son bébé sur le dos, dans sa gigoteuse, sur un matelas ferme, et dans un lit à barreaux sans coussin, drap, couette, cale-bébé, ni tour de lit… La chambre ne doit pas être surchauffée (18 °C à 20 °C) et l’air doit circuler (voir les 10 règles d'or). Il est nécessaire d’être vigilant, mais « il ne faut pas se faire peur, tempère la pédiatre. C’est inutile d’aller voir son bébé toutes les deux minutes. »
 

Ecouter le Dr Inge Harrewijn. « Les régles d’or du couchage. »
 

Connaît-on les causes de ces morts inattendues ? Les médecins évoquent plusieurs pistes. « On sait que les enfants entre deux et quatre mois sont dans une période critique du développement, cardiaque et pulmonaire. Ensuite, il y a des facteurs qui rendent les nourrissons plus vulnérables comme le tabagisme des parents, une naissance prématurée, un faible poids de naissance. Puis, nous avons aussi déterminé des facteurs déclenchants, comme le fait de le coucher sur le ventre, ou les infections pulmonaires, ainsi le nombre de décès par mort subite est plus élevé en hiver. »

Ecouter le Dr Inge Harrewijn. « Des facteurs rendent l’enfant plus vulnérable, comme le tabagisme de la maman, une naissance prématurée, un faible poids de naissance. »
 

Pour intensifier les recherches et accroître la prévention, les pédiatres des 34 centres référents français sur la mort inattendue du nourrisson ont décidé de regrouper leurs efforts. Une association a été constituée pour créer un registre nationale des morts subites du nourrisson, et aussi interpeller les pouvoirs publics pour qu’ils relancent une campagne d’information aurprès du grand public.