Les glaciers fondent, les écosystèmes s'éteignent, la biodiversité s'affaiblit et les catastrophes naturelles s'intensifient. Si vous ne le saviez pas encore, il y a urgence. Chaque jour, les ressources de la Terre s'amenuisent, les températures augmentent et avec elles, la détérioration de la santé humaine. Si le réchauffement climatique impacte gravement des facteurs déterminants pour notre santé physique comme les sols, l'air et l'eau, que ses conséquences sur les systèmes de soins sont importantes puisqu'il favorise la recrudescence d'infections, accroit les inégalités sociales et fragilise les populations déjà vulnérables, il influe aussi considérablement sur notre santé mentale.
250 millions de réfugiés climatiques d'ici à 2050
Notamment via "la fréquence et l'intensité des catastrophes naturelles" (incendies, tempêtes, tornades, ouragans, inondations...) qui peuvent générer traumatismes, stress, dépression et bouleversement émotionnel chez les populations touchées. La disparition de leurs proches, de leur logement, de leur lieu de travail et des points de ventes alimentaires, associée à leur migration vers d'autres endroits, affectent sérieusement leur équilibre psychologique. La promiscuité entre les réfugiés climatiques et leur précarité peuvent également accroître les transmissions inter-humaines de maladies, ou même entre humains et animaux.
Le manque d'eau propre favorise les problèmes d'hygiène, mais aussi la sécheresse et la famine. La destruction des cultures et l'inaccessibilité des routes rendent la livraison de provisions et de médicaments difficile. De même que le manque de moyens humains et d'aides humanitaires durant les premières heures, voire les premiers jours suivant la catastrophe. Les intervenants du colloque "Changement climatique : quelles conséquences sanitaires ?" organisé par Esther Benbassa, sénatrice EELV de paris et David Belliard, Président du groupe écologiste de Paris, le 12 octobre au Sénat, sont clairs sur le sujet : "les catastrophes naturelles vont se produire de plus en plus régulièrement" et s'intensifier, parce que la Terre a mal. Et ses crises climatiques affectent le bien-être physique et mental des humains.
Dans leur rapport - demandé par la Convention-Cadre des Nations Unies sur les Changements Climatiques (CCNUCC) - qui doit servir aux discussions de la COP24 qui débutera le 3 décembre à Katowice, en Pologne, Al Gore et les experts du GIEC prévoient également une hausse des pathologies liées au stress. En 2011 déjà, quatre scientifiques estimaient dans la revue scientifique Nature qu'en l'état, on recenserait 250 millions de réfugiés climatiques d'ici à 2050 et que les déplacements de population dus à l’élévation du niveau des mers ainsi qu'à la destruction des logements et des hôpitaux seraient à l'origine de nombreux troubles mentaux.
L’ouragan Katrina associé à une augmentation de 4% des troubles mentaux
Ce constat alarmant rejoint celui des chercheurs du MIT Media Lab, du centre médical Bedford Affairs et du Laureate Institute for Brain Research, qui ont récemment étudié l'état de santé mentale de deux millions d'Américains entre 2002 et 2012 et comparé ces données avec les informations météorologiques collectées sur la même période. "Nous constatons que le passage de températures mensuelles comprises entre 25°C et 30°C à plus de 30°C augmente la probabilité de développer des troubles mentaux de 0,5%, et qu’un degré Celsius de réchauffement sur 5 années est associé à une hausse de 2% de la fréquence des problèmes de santé mentale".
Le réchauffement climatique n'impacte donc pas seulement notre santé physique. "L’exposition à l’ouragan Katrina a été associée à une augmentation de 4% de ce score", notent les chercheurs. "Les augmentations exogènes de la température mensuelle et des jours de précipitation supplémentaire amplifient la probabilité d’avoir des problèmes de santé mentale en un mois".
A moindre mesure, les vagues de chaleur caniculaire engendrent également des troubles de l'humeur, une fatigue intense, un manque de concentration, de discernement et de motivation. La hausse des températures peut impacter la qualité du sommeil et donc (effet boule de neige oblige), le bien-être au travail, la productivité, la qualité des relations sociales ou encore la forme physique. Le réchauffement climatique n'impacte donc pas seulement les espèces animales ou la faune et la fore, mais également les humains, leur bien-être et leur santé.
"Tout va se jouer dans les 10 années à venir"
Pour autant, sur 180 pays ayant ratifié l'Accord de Paris, seuls 9 ont engagé des actions. "La pollution est la plus grande menace de cette hausse des températures et est à l'origine d'environ 7 millions de morts, pour un coût estimé entre 0,9 et 1,8 milliard d'euros", a-t-on déclaré au Sénat.
Pour guérir la planète, le Dr Jean-François Toussaint, Professeur de physiologie et directeur de l'Institut de recherche biomédicale et d'épidémiologie du sport (IRMES) a estimé qu'il faudrait renoncer à 80% des énergies fossiles. Yves Richard, Professeur de géographie au Centre de Recherches de Climatologie a recommandé la plantation de centaines d'arbres pour rafraîchir les grandes villes, dont les matériaux conservent la chaleur. "C'est tout simple, mais le végétal est le meilleur rempart contre la chaleur". Pourquoi ne pas proposer d'éduquer les enfants ? "Parce qu'il sera trop tard, tout va se jouer dans les 10 années à venir, c'est à nous d'agir, maintenant".