La grossesse a encore quelques secrets que les scientifiques découvrent petit à petit. Des chercheurs de l’université de Linköping en Suède ont découvert le rôle du thymus, un organe du système immunitaire, normalement peu fonctionnel chez l'adulte, et qui interviendrait dans la tolérance au fœtus par le système immunitaire de la femme enceinte, sans qu'il y ait immunosuppression.
Leurs résultats sont présentés dans la revue Journal of Allergy and Clinical Immunology.
Protéger la mère sans rejeter le fœtus
Le thymus est un petit organe situé près du cœur. Il produit des cellules T, réparties dans l’organisme, qui vont déterminer les réactions immunitaires : un corps étranger, une bactérie ou un virus par exemple, doit être combattu par le système immunitaire.
La réaction de celui-ci pendant la grossesse est source d’interrogations pour les scientifiques : comment le corps peut à la fois protéger la mère des infections sans rejeter le fœtus, issu à 50% des cellules du père et qui est donc un corps étranger au plan immunologique ?
Une plus grande production de lymphocytes T régulateurs
Les études précédentes ont montré que chez les souris, le thymus a un rôle réduit pendant la grossesse : il produit moins de cellules T, ce qui empêche l’organisme de rejeter le fœtus. Les scientifiques suédois ont voulu comprendre si le même phénomène se produit chez l’humain. Ils ont analysé le sang de 86 femmes dont 56 étaient enceintes. Le taux de lymphocytes T régulateurs (Treg), une sorte de cellules T, a été analysé car ce sont elles qui contrôlent les autres cellules du système immunitaire.
"Nous avons montré que la production de cellules T par le thymus ne varie pas pendant la grossesse, explique Sandra Hellberg, l’une des auteurs de cette étude. Nous avons aussi montré que la production de lymphocytes T régulateurs, qui peuvent affaiblir la réponse immunitaire, tend à augmenter pendant la grossesse." Ces cellules garantiraient la protection de la mère face aux virus et bactéries tandis qu’elles assurent également la tolérance du fœtus.
Des pistes pour mieux comprendre la sclérose en plaques
Ces résultats répondent à d’anciennes interrogations de la communauté scientifique mais ils apportent aussi des pistes dans la compréhension de certaines maladies auto-immunes comme la sclérose en plaques. Le thymus des personnes atteintes a une activité réduite et produit moins de cellules T, or les femmes enceintes qui ont une sclérose en plaques en ressentent en général moins les symptômes pendant la grossesse.
Les chercheurs suédois veulent désormais continuer leurs recherches sur des femmes enceintes atteintes de sclérose en plaques pour comprendre le rôle exact des cellules T dans l’amélioration ou l’aggravation des symptômes.