Trois experts, nommés par la justice, ont rendu un très attendu rapport sur la situation de Vincent Lambert. Ils ont confirmé son "état végétatif chronique irréversible" qui ne lui laisse plus "d'accès possible à la conscience". "Vincent Lambert est dans un état d'incapacité fonctionnelle psycho-motrice totale", ont expliqué les experts, ajoutant que "des éléments minimes d'aggravation ont été enregistrés".
Cette conclusion était très attendue puisqu’elle était un préalable requis avant un éventuel déclenchement d'une procédure d'arrêt des soins, demandée depuis le 9 avril par le CHU de Reims où le patient est hospitalisé. La dernière expertise officielle datait de 2014 et les experts ont estimé que l’état de Vincent Lambert "en 2018 est comparable cliniquement à celui enregistré en 2014".
Un état qui lui interdit "toute qualité de vie"
Les experts précisent que sa "situation d'impotence fonctionnelle totale du fait des lésions encéphaliques irréversibles" lui interdit "toute qualité de vie" et ne rend "plus d'accès possible à la conscience". Ils ajoutent que "la limitation extrême ou totale de ses capacités d'accès à la conscience, de communication, de motricité, d'expression de sa personnalité, l'altération irréversible de son image lui portent atteinte à un point qui n'est pas acceptable par lui-même et par son épouse et tutrice".
Rachel Lambert, sa femme, se bat pour faire respecter la volonté de son mari qui, selon elle, n'aurait pas voulu d'acharnement thérapeutique. Malheureusement pour elle, il n’a pas formulé cette volonté par écrit. Étant donné la discorde familiale, il s’agit désormais pour la justice de se prononcer à partir de cette nouvelle expertise.
Des conclusions nuancées
Mais les experts se montrent plus nuancés sur certains points. Ils estiment ainsi que les "besoins fondamentaux primaires ne relèvent pas de l'acharnement thérapeutique ou d'une obstination déraisonnable". Ils plaident pour un transfert vers une structure "pouvant l'accueillir jusqu'à sa disparition si le maintien au CHU de Reims s'avérait impossible pour des raisons autres que relevant de la simple technique médicale".
Une position qui rejoint celle de ses parents, catholiques proches des milieux intégristes, et une partie de sa fratrie, qui avaient demandé cette expertise et considèrent que Vincent est "handicapé" mais a fait "des progrès". "Nous rejoignons l'avis des experts quant à la nécessité de transférer enfin Vincent dans un établissement spécialisé" pour qu'il ait "accès aux meilleurs soins", a déclaré Me Jean Paillot, l'un des avocats des parents du patient. Cette requête a toutefois déjà été rejetée par la justice.
Un symbole du débat sur la fin de vie
À la suite d’un accident de voiture en 2008, Vincent Lambert a été placé dans un état de conscience minimal. En 2013, après cinq ans à tenter sans succès d’améliorer son état, l’équipe médicale a décidé de cesser de l’alimenter et de l’hydrater. Problème, si elle en a informé sa femme, elle n’a pas réclamé l’avis de ses parents et de ses frères et sœurs. Le CHU de Reims a alors annulé cette décision.
Depuis, la bataille judiciaire autour de Vincent Lambert est devenue le symbole du débat sur la fin de vie. Alors que les recours juridiques incessant empêchent la prise de décision finale, la Cour Européenne des Droits de l’Homme a rendu une décision en 2015 validant la procédure d’arrêt des soins. Ce nouveau rapport pourrait ouvrir la voie à une nouvelle ère judiciaire dont l’issue semble toujours incertaine.