Pas d’augmentation de "problèmes de santé graves". Telle est la conclusion rendue par le ministère de la Santé sur la nouvelle formule du Levothyrox. Cette dernière fait suite à des mois d’enquêtes de l’Agence du médicament (ANSM), de nombreux malades de la thyroïde s’étant plaints d’effets secondaires indésirables après la prise du nouveau médicament introduit par le laboratoire Merck en 2017. Au terme d’analyses, l’agence a également confirmé "la bonne qualité de la nouvelle formule du Levothyrox".
L’étude a passé au crible le nombre de morts, d’hospitalisation et d’arrêts de travail d’au moins sept jours entre avril et juin 2017, soit après l’arrivée du médicament sur le marché, en les comparant à la période d’avril à juin 2016. Résultat: les données ne montrent pas d’augmentation de problèmes de santé grave avec le nouveau Levothyrox, assure l’ANSM. Cette dernière reconnaît toutefois une "augmentation notable" des consultations parmi les patients ayant utilisé la nouvelle formule en 2017. "Elle a tout particulièrement concerné les recours auprès de médecins généralistes et d’endocrinologues et s’est concentrée sur la période d’août à octobre 2017", détaille l’agence faisant état de 360 000 consultations supplémentaires, soit +2% .
Sans surprise, l’Association française des malades de la thyroïde (AFMT) a immédiatement contesté les résultats de ce rapport. Au regard des effets indésirables inexpliqués rapportés par de nombreux malades (crampes, maux de tête, vertiges, pertes de cheveux…), l’absence d’anomalies dans les analyses "ne peut en aucune façon permettre de garantir la qualité" du médicament, assure l’association.
Demande d'annulation du brevet de la nouvelle formule du Levothyrox
L'étude a beau montrer que "le passage à la nouvelle formule n'a pas déclenché une vague de décès", "nul ne l'avait jamais prétendu", renchérit l'AFMT expliquant qu'une dizaine de décès supplémentaires comparativement au nombre de décès prévisibles "ne seraient pas statistiquement significatifs mais bien réels pour autant". Qui plus est, à la fin de la période analysée (fin 2017), plus de 15% de patients inclus dans l’étude avaient abandonné la nouvelle formule pour une alternative. "S’ils l’ont fait, c’est parce qu’ils n’étaient pas satisfaits avec la nouvelle formule", insiste l’AFMT. En effet, d’après les chiffres officiels des pharmacies, le nombre de patients ayant opté pour un autre traitement que le Levothyrox a continué à grimper en 2018.
Une semaine après l'ouverture du procès intenté au civil par 4113 consommateurs contre Merck début décembre, une centaine de plaignants a par ailleurs déposé une assignation en justice pour demander l’annulation de la nouvelle formule du Levothyrox. L’assignation conteste le brevet pour "insuffisance de l’exposé de l’invention, défaut de nouveauté et défaut d’activité inventive", explique l’AFMT sur son site. Les plaignants demandent "l’annulation de la partie française du brevet", selon leur avocate Anne-Catherine Colin-Chauley, car "Merck cherche à étendre sa nouvelle formule à toute l’Europe et le risque serait que les patients ne puissent plus se fournir à l’étranger, en Italie, en Belgique ou en Allemagne".
Attaqué, le laboratoire a rétorqué qu’il "ne comprend pas la finalité de l’action engagée contre son brevet" qui "ne vise en aucun cas à préserver une quelconque part de marché". "Merck a déposé un brevet sur la nouvelle formule car c’est le seul moyen de protéger les résultats de la recherche interne", poursuit le groupe, rappelant au passage que "plus de 30 millions d’euros" ont été investis dans cette nouvelle formule.