Les grèves et les manifestations ont fini par payer. "Au total, (…) ce sont 100 millions supplémentaires par an pour la psychiatrie et la santé mentale, dès cette année", a expliqué la ministre de la Santé Agnès Buzyn au Congrès de l’encéphale, reconnaissant "les impatiences légitimes" des professionnels de santé venus l’écouter. "J’ai dit dès ma prise de fonction que la psychiatrie était le parent pauvre de notre système de santé", a-t-elle justifié jeudi 24 janvier.
Cet argent va servir à...
Dans le détail, 40 millions d’euros seront débloqués cette année pour les mesures dévoilées en juin par le gouvernement. Ils viennent s’ajouter aux 64 millions d’euros issus des crédits dégelés exceptionnellement dans leur intégralité en décembre 2018, ainsi qu’aux 50 millions d’euros de rallonge promis au même moment.
Concrètement, cet argent va servir à former des étudiants aux premiers secours en santé mentale, à mieux prévenir le suicide, développer la pédopsychiatrie, renforcer "l’offre de logement pour les personnes ayant des troubles psychiques", améliorer l’accompagnement des personnes handicapées psychiques dans leur vie professionnelle, lancer une "mission sur l’évolution des centres médico-psychologiques (CMP)", ou encore créer une formation d’infirmiers de pratique avancée en psychiatrie.
Grèves et manifestation
Mardi 22 janvier, une manifestation s’est organisée place de la République à Paris pour dénoncer le manque de moyens en psychiatrie. Plusieurs collectifs de patients et de soignants du secteur de la santé mentale sont à l’origine du mouvement, comme l'Union syndicale de la psychiatrie (USP), les syndicats SUD et CGT ou encore le Collectif 39.
Ils alertaient sur la "banalisation des pratiques d'isolement et de contention qui se sont multipliées au cours des vingt dernières années", et militaient pour améliorer les conditions de soins et de travail. L’idée était aussi de permettre la convergence des nombreuses grèves qui ont lieu dans différents hôpitaux, comme récemment à Amiens, Rouen ou au Havre. A l’heure actuelle, une dizaine d’hôpitaux psychiatriques connaissent des mouvements suivis de mobilisations.
Une situation dramatique
"On veut suffisamment de personnels pour pouvoir écouter les patients et éviter des situations dramatiques où l'on se retrouve contraints de les enfermer, de les contentionner", affirme dans Le Figaro Oriane Cayard, infirmière au GHU Paris psychiatrie et neurosciences. "Quand j'ai commencé en psychiatrie il y a 14 ans, les conditions n'étaient déjà pas top, mais je connaissais les patients, ils me connaissaient, j'arrivais à anticiper les situations de crise. Maintenant on n'arrive plus à retenir leur nom de famille", critique-t-elle.
Cela fait longtemps que la situation des soins psychiatriques est jugée catastrophique en France. "Plus de 25% des postes de psychiatres dans les hôpitaux ne sont pas pourvus. (...) La situation est tendue et dramatique", a déclaré le président de l'USP Pascal Boissel dans Libération.