107 766 années de vie en bonne santé sont perdues chaque année en Ile-de-France à cause des nuisances sonores, selon les conclusions inquiétantes d'un rapport de Bruitparif, l'observatoire du bruit en Île-de-France, révélées par Le Monde. Dans cette "zone dense francilienne" où vivent 10 millions d'habitants, 90% de la population est exposée à des niveaux de bruit supérieurs aux seuils recommandés par l’Organisation mondiale de la santé (OMS).
Dans les zones les plus exposées aux nuisances sonores des transports (situées près d'un aéroport, d'une autoroute ou à proximité d'un chemin de fer par exemple), les habitants peuvent même perdre plus de trois ans de vie en bonne santé. Un constat alarmant.
L'impact sanitaire du bruit environnemental
"Les impacts sanitaires de l’exposition au bruit sont de deux ordres : impacts sur l’audition et impacts dits extra-auditifs", écrit l'observatoire. Plus précisément, "les impacts auditifs peuvent affecter l’oreille externe, l’oreille moyenne et l’oreille interne. Les impacts extra-auditifs ne sont pas encore tous connus, mais ils concernent avant tout les domaines suivants : effets cardiovasculaires et métaboliques (troubles endocriniens et immunitaires, notamment), gêne, effets sur le sommeil, troubles des apprentissages, effets indésirables pendant la grossesse, qualité de la vie, santé mentale et bien-être, entre autres".
L'exposition prolongée au bruit environnemental, en particulier dans les zones denses, constitue donc un enjeu de santé public, pourtant encore sous-estimé par les pouvoirs publics. En moyenne, les nuisances sonores générées par les transports dans l’agglomération parisienne sont responsables, chaque année, de la perte de 75 000 années de vie en bonne santé, soit une perte de 7,3 mois par habitant en moyenne au cours d’une vie entière. A noter que cette perte peut atteindre "18 mois pour les personnes les plus fortement exposées au bruit".
Le principal effet négatif observé sur la santé demeure les troubles du sommeil, qui représentent chaque année, la perte de 44 000 années de vie en bonne santé. "La gêne auditive est le deuxième effet sanitaire avec 30 000 années de vie en bonne santé perdues par an". Le bruit de la circulation routière constitue quant à elle, "la principale source de morbidité, en concentrant à lui seul 85% des estimations de pertes d’années de vie en bonne santé dans l’agglomération parisienne", s'alarme l'observatoire. A ce titre, Bruitparif classe le bruit comme "la seconde cause de morbidité derrière la pollution atmosphérique" parmi les facteurs de risque environnemental en ville.
Les nuisances sonores génèrent du stress
En novembre dernier, une étude présentée aux Séances scientifiques 2018 de l'American Heart Association (AHA), qui se tenaient à Dallas (Texas), affirmait que l’exposition prolongée au bruit augmenterait le risque d’attaques cérébrales et de crises cardiaques car elle alimenterait l’activité de l'amygdale, une région du cerveau impliquée dans la réponse au stress.
Selon les chercheurs, une pollution sonore chronique et élevée augmente le stress, qui lui-même engendre une augmentation de l’inflammation des vaisseaux sanguins, celle-ci étant un facteur de risque connu des maladies cardiovasculaires. Les chercheurs ont d’ailleurs noté que les participants ayant l'activité cérébrale la plus liée au stress étaient plus de trois fois susceptibles de subir un événement cardiovasculaire majeur, tel qu'une crise cardiaque ou un AVC.
En janvier 2018, des chercheurs s'étaient également penchés sur l'impact du bruit des éoliennes sur la santé humaine et en avaient conclu qu'il générait un stress important chez les personnes les plus exposées géographiquement. La littérature scientifique regorge ainsi de conclusions alarmantes attestant des effets négatifs du bruit sur la santé. L’OMS à même réévalué ses seuils à la hausse : 53 décibels (dB) pour le trafic routier sur 24H et 45 dB durant la nuit (entre 22 heures et 6 heures du matin), et 40 dB pour les avions.