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Sonnette d'alarme

Chine : des scientifiques soupçonnés d'avoir utilisé des organes de détenus chinois

Par Raphaëlle de Tappie

Deux chercheurs australiens réclament le retrait de centaines d'études chinoises qui auraient utilisé des organes prélevés sur des prisonniers sans leur consentement. 

Shuttermon/iStock
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"L’omerta autour de cette barbarie doit cesser". Dans un article paru dans la revue médicale BMJ Open, deux chercheurs australiens de l’Université de Sidney réclament le retrait de plus de 400 études scientifiques qui auraient utilisé des organes prélevés sur des prisonniers chinois sans leur consentement.  

En examinant 445 études publiées entre 2000 et 2017 sur des greffes d’organes en Chine, Wendy Rogers et Matthew Robertson se sont ainsi rendus compte que 92% d’entre elles ne mentionnaient pas l’origine des organes. Par ailleurs, dans 99% des cas, le consentement des donneurs n’était pas mentionné. De nombreux rapports ayant montré que les autorités chinoises ont prélevé des organes sur des dizaines de milliers de prisonniers exécutés, les chercheurs en ont donc conclu que des centaines d’études avaient été basées sur des greffes non éthiques.  

"Un grand nombre de témoignages crédibles suggèrent que le prélèvement d'organes ne se limite pas aux détenus condamnés, mais inclut aussi des prisonniers de conscience. Il est donc possible - même si ce n'est pas vérifiable dans un cas précis - que des articles scientifiques contiennent des données obtenues via des prisonniers tués pour leurs organes", expliquent Wendy Rogers et Matthew Robertson dans Newsweek.

Aucune loi officielle n'interdit la greffe d’organes de prisonniers

En 2016, un rapport réalisé par l’avocat David Kilgour et le journaliste Ethan Gutmann avait déjà mis en lumière un énorme décalage entre les données officielles et celles des hôpitaux. En effet, alors que le gouvernement chinois assure que 10 000 greffes ont lieu chaque année, les données hospitalières montrent qu’entre 60 000 et 100 000 organes sont transplantés chaque année.

Puis, l’année suivante, le journal médical Liver International avait dû retirer une étude publiée par des chirurgiens chinois après que les origines des organes utilisés soient remises en causes par des académiciens.

Bien que la Chine ait juré avoir cessé d’utiliser des organes prélevés chez les prisonniers exécutés en 2015, aucune loi ou interdiction n’a été votée sur le sujet et les directeurs de recherches chinois ne rendent de compte à personne, s’inquiètent Rogers et Robertson.  

Un tribunal populaire indépendant enquête sur le sujet depuis décembre

"Nous demandons le retrait immédiat de toutes les études qui citent des recherches basées sur des organes de prisonniers exécutés, ainsi que l'organisation d'un sommet international pour développer une nouvelle approche en ce qui concerne la recherche chinoise sur les greffes", réclament-ils donc. "Il ne suffit pas d’avoir des principes éthiques, il faut des lois", renchérit Rogers auprès du Guardian Australia.

En décembre, un tribunal populaire indépendant a commencé à enquêter sur le sujet. "Les membres du tribunal sont tous certains qu’en Chine, la récolte d’organes sur des prisonniers a eu lieu pendant longtemps et impliqué un nombre substantiel de victimes", avait-il tranché au terme de trois jours d’audition publiques. Sa conclusion sera rendue au cours de l’année 2019.