Les salariés du privé seront-ils bientôt concernés par le jour de carence non-rémunéré en cas d’arrêt maladie ? C’est en tout cas la proposition phare, mais aussi la plus sensible, du rapport remis mercredi 20 février au premier ministre Édouard Philippe.
Commandé en septembre dernier à Jean-Luc Bérard, directeur des ressources humaines du groupe industriel Safran, à Stéphane Oustric, professeur de médecine à l’université de Toulouse et à Stéphane Seiller, magistrat à la Cour des comptes, ce rapport contient une vingtaine de propositions sur la réforme du système d’indemnités journalières. Son objectif : le simplifier et le rendre plus juste, mais aussi compenser le coût que font peser les arrêts maladie sur le budget de l’Assurance maladie : environ 7,5 milliards d’euros par an.
Un jour de carence non-payé pour tous
C’est dans cette perspective que la proposition d’étendre le jour de carence "d’ordre public" chez les travailleurs du public comme du privé a été avancée. Actuellement, ce jour de carence non-rémunéré concerne bien tous les fonctionnaires mais, chez les salariés du privé, 60% à 70% des trois jours de carence sont compensés via des accords de prévoyance signés au sein des branches professionnelles.
Pensée pour mettre sur un pied d’égalité tous les travailleurs, cette mesure a fortement déplu aux organisations syndicales rencontrées, reconnaissent les trois auteurs du rapport. Ils suggèrent donc "que cette hypothèse ne soit envisagée que comme contrepartie à des évolutions permettant une meilleure prise en charge de certaines populations de salariés non couvertes par le complément employeur".
Une compensation par les entreprises
Pour compenser ce point sensible, les auteurs du rapport préconisent des mesures de "justice sociale". Ils souhaitent ainsi permettre à neuf millions de salariés, dont ceux qui ont moins d'un an d'ancienneté, les CDD, ou aides à domicile employées par un particulier, de bénéficier d'une compensation de la part de l'employeur pour la perte de salaire liée au congé maladie. Actuellement, la Sécurité sociale indemnise le salarié à hauteur de 50% du salaire brut à partir du quatrième jour.
Autre idée sur la table : forfaitiser l’indemnité journalière versée par la Sécurité sociale et en finir avec son calcul proportionnel et le plafonnement à 0,9 SMIC. Si cette mesure était adoptée, le montant de l’indemnité journalière pourrait être fixé à 0,7 SMIC pour tous. "Cette mesure, neutre pour la Sécurité sociale, représenterait une économie directe pour toutes les entreprises dont le salaire moyen est inférieur au double du forfait", ainsi qu’"un allègement massif des coûts de gestion", expliquent les auteurs du rapport.
Parmi les autres recommandations, celle de remplacer les contrôles médicaux aléatoires des salariés à leur domicile par des convocations en cabinet, une autre pour favoriser le télétravail ou encore le mi-temps thérapeutique après un arrêt maladie long pour "prévenir la désinsertion professionnelle".
Avant toute négociation, le rapport sera présenté aux partenaires sociaux dans les prochains mois.