Sept mois après l'entrée en vigueur de la décision d'Agnès Buzyn de dérembourser les médicaments anti-Alzheimer, l'association France Alzheimer en tire un bilan très négatif. 52% des personnes interrogées par l’organisation estiment que l’arrêt brutal des traitements a entraîné une aggravation précipitée des troubles.
"Au bout de 8 jours de sevrage, sa motricité a drastiquement diminué"
"Mon mari était un scientifique, un docteur vétérinaire praticien sensible à la problématique des médicaments « inutiles ». Il a donc décidé d’arrêter les patchs cutanés censés soulager les symptômes liés à sa maladie. Au bout de 8 jours de sevrage, sa motricité a drastiquement diminué. Il avait du mal à réaliser des gestes simples comme manger seul, monter un escalier, se déplacer. Très vite, il s’est plaint de douleurs au niveau de la hanche. Son médecin lui a alors prescrit des séances de kinésithérapie ainsi que des antalgiques. Sa souffrance ne diminuant pas, nous avons décidé de racheter les patchs, à notre charge. 4 jours plus tard, ses mouvements étaient à nouveau fluides, mais les douleurs duesà l’arrêt de son traitement étaient, quant à elles, toujours bien présentes... Dans ce laps de temps sa mémoire immédiate a, elle aussi, été touchée. Il oublie désormais régulièrement son café dans le micro-onde par exemple et peut ne plus savoir ce qu’il fait ou doit faire en une fraction de seconde", témoigne Régine.
Le reste-à-charge a par ailleurs augmenté pour les familles : 2 répondants sur 3 prenaient au moins l’un des médicaments au moment de l’annonce du déremboursement, et 70% d’entre eux n’envisagent pas d’arrêter le traitement au vue de son efficacité. 20% ont mis fin à leur traitement et 10% pensent le stopper prochainement, principalement à cause d’un coût trop important.
"700 euros par an à payer de nos poches"
"Dans l’hypothèse où le traitement n’est plus appliqué, le patient doit alors rejoindre un établissement spécialisé. Le reste-à-charge mensuel pour les pouvoirs publics équivaudrait alors au financement d’une annéecomplète de remboursement du médicament... Pour nous, familles, ce déremboursement équivaut à 57 euros par mois et 700 euros par an à payer de nos poches. C’est énorme lorsqu’on sait qu’au fil du temps de nouvelles charges viendront s’ajouter", ajoute Raymond, dont la femme souffre de la maladie.
Seules 55% des personnes ayant décidé de ne plus prendre de traitements continueront à consulter un médecin spécialiste et 38% ont arrêté de lui rendre visite. Pour 80% des répondants, l’inefficacité des médicaments anti-Alzheimer avancée par le gouvernement est infondée.
"Je confirme le déremboursement des médicaments anti-alzheimer, et ce n’est absolument pas pour des raisons budgétaires. C’est parce que ces médicaments ont été montrés par la HAS comme étant néfastes et entraînant beaucoup d’effets secondaires, avec des fractures et des chutes. Nous dé-remboursons pour que les gens ne les utilisent plus", avait expliqué la ministre de la Santé Agnès Buzyn, mercredi 30 mai, sur le plateau du "19/20" de France 3.
Le risque de survenue d’effets indésirables parfois graves
La Commission de la transparence de la HAS a en effet réévalué les quatre médicaments utilisés dans le traitement symptomatique de la maladie d’Alzheimer : Ebixa (Lundbeck), Aricept (Eisai), Exelon (Novartis Pharma) et Reminyl (Janssen Cilag). Elle a estimé que les données accumulées depuis la commercialisation de ces médicaments confirmaient le risque de survenue d’effets indésirables parfois graves (syncopes, réactions cutanées sévères…) et/ou de nature à altérer la qualité de vie des patients (troubles digestifs, cardiovasculaires, neuropsychiatriques…).
Par ailleurs, la HAS a rappelé que la population atteinte de la maladie d’Alzheimer est souvent polypathologique et polymédiquée, ce qui implique que les risques d’interactions médicamenteuses et d’effets indésirables graves sont accrus.